L'artiste peintre Faïza Chaoui expose depuis mercredi dernier ses œuvres picturales et ses poupées traditionnelles dans le sympathique espace Noun à Alger. Elle a de tout temps hésité à montrer ses chef-d'œuvres au public, préférant s'occuper de ses trois enfants. Originaire de la Tidjania de Macine, à quelques encablures de Touggourt, Faïza Chaoui a cependant tenu à montrer en premier lieu, en 2003, son savoir-faire à la population de son village, à travers une exposition symbolique. L'année dernière, elle a eu le privilège d'exposer ses poupées à Paris. Dès le seuil de l'espace Noun franchi, le regard est en admiration devant le décor qui s'offre. En effet, les tableaux picturaux et les poupées traditionnelles en chiffon suscitent un intérêt certain, voire un émerveillement. La vingtaine de poupées en chiffon, posées ici et là sur des étagères, illustrent subtilement la richesse du patrimoine ancestral national. D'une mère constantinoise et d'un père touggourti, Faïza s'est plu à habiller ses poupées de tenues issues du Nord et du Sud algériens. Utilisant tantôt de la soie tissée tantôt de « baza » (tissu spécial du Sud), elle en rehausse ses poupées de toutes sortes. Sur un ton timide et fier à la fois, Faïza Chaoui avoue qu'elle s'est essayée à cette nouvelle passion seulement depuis deux ans. Pour donner un semblant d'expression sur les visages de ses poupées en chiffon, elle les badigeonne modérément de peinture. Qu'elles soient seules ou en couple, ces poupées englobent, pour l'artiste, des souvenirs irrévocables. Elle avoue qu'elle a été bercée, durant son enfance, dans un milieu où le tissu, le fil et le tissage étaient omniprésents. « Ma mère était couturière. Je prenais un plaisir fou à la regarder confectionner des articles dans son atelier de confection. Je pense avoir été contaminée par ce virus à ce moment là, mais à l'époque je ne m'en suis pas rendu compte ». La trentaine de tableaux anonymes exposés, quant à eux, témoignent, d'un talent avéré. De dimensions variés, l'espace de l'ensemble de ses œuvres est parsemé de symboles tels que les poissons, les yeux et les mains. Cependant, la femme arabe occupe une place de choix. On la retrouve plus belle que jamais, prônant la paix et l'union à travers un jeu de mains pluriel où parfois, en filigrane, se devinent des passages de poèmes et de chants prophétiques, à l'image du célèbre poème Al Bourda. A travers cette sélection de tableaux, l'artiste invite l'esthète ou le profane à découvrir les étapes de son travail. Un travail qui s'articule sur ces cinq dernières années. Après avoir commencé à travailler à l'encre de Chine, Faïza Chaoui est passée à une étape supérieure, en utilisant la gouache et l'aquarelle. De ces magnifiques peintures où jaillissent des sujets parlants et des couleurs éclatantes, on ne peut s'empêcher de constater cette flagrante ressemblance avec la peinture de Baya. Faïza s'en défend en affirmant qu'elle voue un grand respect à cette grande dame de la peinture, mais qu'elle n'a été nullement influencée. « Ma peinture, dit-elle, est innocente. Elle découle de la pureté. Je ne fais pas de calcul au moment de me mettre devant le chevalet ». La palette de l'artiste est un florilège de couleurs et un métissage de tons qui se déclinent généreusement dans le rouge, le marron et le noir. Faïza est convaincue que la sélection de ses couleurs dépend de son humeur quotidienne. En plus de la gamme de tableaux qu'elle offre, l'artiste présente d'immenses panneaux sur lesquels sont représentées de majestueuses femmes algériennes. Une nouvelle technique qu'elle a découvert en juillet dernier lui procure une sérénité « incroyable ». Il est à noter que cette sublime exposition intitulée « Rétrospective » se poursuivra jusqu'au 13 mars prochain à l'espace Noun. Avis aux amateurs.