Interpellé par ce qu'il considère comme une disparition, le frère de Faïrouz s'ingénie à démêler la mystérieuse perte de sa sœur. Depuis le 6 avril 2006, journée au cours de laquelle Azzedine Meriche, dit Yazid, a retrouvé son père considéré jusque-là comme chahid (un chahid bien vivant in El Watan du mardi 13 mars 2007), d'aucuns croyaient que cela lui ramènerait la sérénité et la satisfaction du devoir accompli. C'est bien le contraire qui s'est produit. A force de persévérance, il continua le combat pour assurer à son père une réparation morale et administrative après ce qu'il appelle « le complot dont il a été victime après son incarcération par les forces coloniales », et déclaré décédé le 12 novembre 1958. L'obstination de Yazid allait le mener vers un autre drame qui concerne, cette fois-ci, sa sœur cadette Faïrouz. En 2007, il nous avait raconté que sa sœur Faïrouz avait été lâchement assassinée le 10 mai 1961 à l'âge de 31 mois, alors que sa tante et une cousine avaient été blessées par balles. Intrigué par les réponses données à ses questions, Yazid s'est embarqué dans une autre quête pour déterminer le devenir de sa sœur dont le corps n'a jamais été restitué à la famille. Interpellé par ce qu'il considère désormais comme une disparition, le frère de Faïrouz s'ingénie à démêler la mystérieuse perte de sa sœur. D'après les témoignages et documents — que nous avons eus sous les yeux — rassemblés par le frère meurtri par la privation de son père et sa sœur depuis son jeune âge, tout a commencé lors d'une manifestation organisée à Jijel le 9 mai 1961. Yazid qui jouait en compagnie de sa sœur et une cousine au niveau de l'actuelle avenue Emir Abdelkader ont été surpris par des tirs d'armes de soldats français. Blessées, sa tante, sa cousine et Faïrouz seront évacuées le même jour vers l'hôpital de Jijel, où elles seront admises pour une nuit. Effleurée par une balle à l'abdomen, le petit chérubin sera enregistré à son admission nous le matricule n°1409. Le lendemain, soit le 10 mai 1961, sa tante blessée au mollet et sa cousine touchée à l'abdomen quitteront l'hôpital après avoir reçu les soins nécessaires. Quant à la petite Faïrouz, le registre de l'hôpital et le certificat de séjour — en possession de son frère Yazid — attestent qu'elle est sortie de l'hôpital avec la mention : « Sortie normale ». La famille sera avisée que la petite est décédée sans toutefois que le corps ne soit récupéré. Yazid, à qui on n'a jamais pu montrer le tombeau de l'ange de 31 mois, restera médusé quand il découvrira la date de déclaration du décès à l'état civil de la commune de Jijel. La mort avancée à la famille en mai 1961 n'a été transcrite sur le registre d'état civil que le 7 décembre 1962, soit pas moins de 17 mois après ce prétendu décès, et cinq mois après l'indépendance de l'Algérie. Ce détail fera désormais croire à Yazid que cette nouvelle tragédie a bien des points d'analogie avec celle de son père, forcé à fuir sa ville natale, Jijel, et sa famille pour une raison que le temps devra bien dévoiler un jour. La déclaration du décès a été faite par Joseph Bonmati, directeur de l'hôpital de Jijel au moment de l'hospitalisation de la fillette. Or, ce dernier a quitté ses fonctions à l'hôpital au mois de juillet 1961 et remplacé par M. Loth. Alors, comment se fait-il qu'il ait pu faire cette déclaration le 7 décembre 1962, 17 mois après son départ de Jijel ? Ou bien, est-ce une autre personne qui a fait la déclaration en se cachant derrière l'identité de Bonmati ? Des questions qui ne cessent de tarauder l'esprit de Yazid. Privé de son père pendant 48 ans, il ne compte pas lâcher l'affaire avant de découvrir la vérité sur la sœur et déterminer « à qui incombe la responsabilité de cette déchirure, les commanditaires, et pour quel intérêt. »