Il est des pertes qui marquent au-delà des familles, une société tout entière. L'assassinat de M'hamed Boukhobza, au même titre que celui de Djilali Liabes et tant d'autres intellectuels algériens, fut un acte de haine contre la pensée et la réflexion. Le colloque de deux jours organisé par l'Association algérienne pour le développement de la recherche en sciences sociales, en hommage à M'hamed Boukhobza, a montré et démontré que l'acte de tuer est toujours vaincu devant l'acte de mémoire. Et quelle meilleure reconnaissance à ces héros tragiquement ravis à leurs familles et pays que d'immortaliser leur nom sur un lieu de savoir. Tel a été le plaidoyer soutenu par les participants au dit colloque en appelant à baptiser une université algérienne du nom du regretté Boukhobza en reconnaissance à son « apport dans l'enracinement des sciences sociales en Algérie ». La tenue de cette rencontre dédiée au souvenir et la perpétuation de l'œuvre de Boukhobza a permis à la communauté des sciences sociales de mettre sous les feux de la rampe le déni dont elle fait l'objet et qui se ressent sur la quasi absence de la recherche dans le domaine sociologique du fait du manque de moyens, mais surtout de l'absence d'une réelle volonté politique allant dans le sens de la compréhension de la société algérienne. Les travaux de M'hamed Boukhobza ont été marqués par une démarche de compréhension approfondie du corps sociétal, notamment les populations nomades et agropastorales dont il était issu, il a su lancer les bases de la recherche purement empirique et éthique, n'obéissant à aucune injonction si ce n'est le devoir de dire et de dire vrai. Les travaux du colloque se sont attardés et à juste titre sur l'apport du défunt non seulement au travail scientifique pur, mais aussi sa contribution à aborder des questionnements sur le projet de société que se devait d'adopter l'Algérie. Certains ouvrages de Boukhobza sont malheureusement introuvables, le comité du colloque a appelé pour la récupération de tous les manuscrits et documents lui appartenant afin de les rendre publics.