Grande première dans les relations entre la Syrie et la direction palestinienne, marquées davantage par les bas que par les hauts. Ces relations étaient à la limite conflictuelles sans jamais dépasser ces dernières années, les limites de ce qui est globalement toléré. Ce n'est plus comme la destruction en 1976 du camp de réfugiés palestiniens de Tal Zaâtar au Liban, ou encore cette opposition palestinienne y compris militaire, basée à Damas et dirigée contre la direction légitime palestinienne. Il n'y a pour cela que de se rappeler les affrontements inter-palestiniens, de 1983 au nord-Liban. La direction palestinienne était alors convaincue que de tels problèmes étaient dus à une question de leadership, autrement dit que la Syrie était accusée de vouloir exercer sur elle un contrôle total, soit une véritable tutelle politique. On n'en est plus là, et la direction palestinienne a entamé hier à Damas pour une première visite de cette importance en Syrie depuis 1996 avec pour objectif de tourner la page sur deux décennies de tension. Le nouveau président de l'OLP, Mahmoud Abbas, le Premier ministre Ahmad Qoreï, le président de l'Autorité palestinienne par intérim Rawhi Fattouh et le chef de la diplomatie Nabil Chaath, doivent s'entretenir avec le président Bachar Al Assad, son Premier ministre Mohammad Naji Otri et le chef de la diplomatie Farouk Al-Chareh. Des rencontres sont prévues avec des représentants de l'opposition palestinienne à Damas, a-t-on indiqué de source palestinienne, sans autres précisions. Les entretiens entre les responsables syriens et palestiniens porteront sur « Les développements de la situation dans les territoires occupés et le renforcement de l'unité des Palestiniens après le décès du président Yasser Arafat », selon une source officielle syrienne. Ce qui ne veut absolument rien dire, car de telles relations, rappelle-t-on encore, n'ont jamais été marquées par le sceau de la normalité. Elles ont été pratiquement rompues après la conclusion en 1993 des Accords israélo-palestiniens d'Oslo, la Syrie ayant dénoncé ces accords « séparés » qui ont affaibli, selon elle, les négociateurs arabes face à Israël. « Nous allons expliquer aux Syriens les développements depuis le martyre d'Abou Ammar et nous parlerons de l'avenir auquel nous aspirons », a indiqué pour sa part M. Abbas (Abou Mazen), qui a succédé à la tête de l'OLP à Yasser Arafat décédé le 11 novembre dernier et qui est candidat du Fatah à l'élection du président de l'Autorité palestinienne le 9 janvier. En mars 2001, Yasser Arafat et Bachar Al-Assad s'étaient rencontrés à Amman en marge du sommet arabe, alors qu'en septembre de la même année une visite du chef historique palestinien en Syrie avait été annulée à la dernière minute. Le 24 novembre dernier, M. Assad a reçu à Damas Farouk Kaddoumi qui a succédé à Yasser Arafat à la tête du mouvement Fatah. M. Kaddoumi a maintenu le contact avec les Syriens. La visite des responsables palestiniens intervient à un moment où la Syrie a annoncé sa volonté de relancer les pourparlers de paix avec Israël, gelés depuis janvier 2000. Dix mouvements palestiniens de l'opposition sont basés à Damas depuis les années 1980. Mais depuis plus d'un an, ces organisations ont fermé leurs permanences et leurs dirigeants se font de plus en plus discrets. Et selon des sources palestiniennes, la délégation menée par Abou Mazen devrait étendre ses entretiens à ces organisations pour aplanir l'ensemble des différends afin de franchir sans heurt la phase de succession, et après elle, la perspective de rouvrir le dossier des négociations avec Israël. Un consensus semble se faire jour au plan international avec les idées avancées ou attribuées au Président américain qui aurait mis la question palestinienne en tête des priorités de son nouveau mandat. C'est lui aussi qui a dégagé une nouvelle perspective pour la création d'un Etat palestinien, qui n'est plus 2005 comme l'envisageait la feuille de route, ce plan de paix international mis au point par le quartette (Etats-Unis, Russie, ONU et Europe), mais en 2009.