La Ligue algérienne des droits de l'homme (LADH) a tenu en ce 3 mai, Journée mondiale de la liberté de la presse, à rendre un hommage aux hommes de la presse de manière générale et plus particulièrement à ceux qui, souvent, doivent surmonter de grandes difficultés pour informer le public sur les affaires du pays et de la libre circulation des idées. La LADH, par la voix de son président Boudjema Ghechir, regrette qu'aujourd'hui on n'assiste pas uniquement à une atteinte aux libertés d'expression à travers l'acharnement judiciaire contre les journalistes, mais ce sont les libertés publiques que l'on tente de bâillonner et les droits fondamentaux que l'on veut bafouer. « De sérieuses inquiétudes existent quant aux intentions du pouvoir contre les militants des droits humains et contre la démocratie naissante. Une action de contestation se paie trop souvent au prix de sa liberté », a noté notre interlocuteur. Scandalisé, M. Ghechir a au passage énuméré les multiples lois qui répriment le journaliste, en commençant par le code de la presse et le code pénal qui prévoient toujours des peines de prison à la nouvelle ordonnance, votée en février 2006, portant sur la mise en œuvre de la charte pour la paix et la réconciliation nationale. Ce texte se révèle tout aussi dangereux pour les professionnels des médias et les militants des droits humains puisqu'il prévoit des peines de cinq ans de prison et des amendes pour tout individu qui « par ses déclarations, écrits ou tout autre acte, utilise ou instrumentalise les blessures de la tragédie nationale, pour porter atteinte aux institutions de la République... ». Dans le même sillage, la LADH estime que les procès qui se sont ouverts devant les juridictions sont particulièrement représentatifs de l'instrumentalisation de la justice par les autorités algériennes. « Les sanctions qui sont déjà tombées marquent le début d'un nouveau feuilleton politico-judiciaire dont l'issue semble jouée d'avance. La justice est rendue au nom du peuple et dans l'intérêt de la défense du peuple, elle ne peut pas être utilisée par le pouvoir politique pour régler des comptes », a-t-il souligné. La cohabitation presse-pouvoir dans notre pays, selon M. Ghechir, ne sera jamais simple, d'autant que les dirigeants qui se sont succédé à la tête du pays proviennent quasiment tous de la même famille idéologique – du parti unique. De ce fait, ils n'arrivent pas à se départir de certains comportements pour le moins autoritaires. L'Algérie, d'après la LADH, a besoin d'une presse critique et d'investigation qui joue un rôle effectif dans sa vie publique. Ceci exige que le harcèlement judiciaire, comme la pénalisation des délits de presse, et les pressions financières prennent fin. Il faudrait aussi, note M. Ghechir, démonopoliser et libérer le marché publicitaire qui est quasi monopolisé par l'Etat, puisqu'une agence publique collecte la publicité pour son compte et la redistribue en fonction de la docilité des journaux, et mettre en place des mécanismes de soutien à la presse comme ces dispositions qui existent dans les pays démocratiques. La liberté de la presse est l'une des conditions essentielles au pluralisme politique et syndical, mais celle-ci exige d'un autre côté l'équilibre entre la liberté et la responsabilité d'informer.