La 6e édition du colloque international sur les massacres du 8 mai 1945 à Guelma a commencé hier dans la salle de conférences de la bibliothèque centrale de l'université 8 Mai 45 de Guelma. La première communication introductive a été donnée par Gilles Manceron, journaliste et historien français, vice-président de la Ligue des droits de l'homme, ayant pour titre « L'occultation dans la société française des événements du 8 mai 45 en Algérie et le lent mouvement vers la reconnaissance ». Ainsi, l'ordre chronologique des événements sanglants qui sont intervenus dans le Constantinois a été dissimulé par l'armée coloniale et largement déformé par la presse française, contrairement aux dernières déclarations de la France officielle, telles que celles de l'ex-ambassadeur de France en Algérie, Colin de la Verdière, le 27 février 2005, à Sétif, qui a parlé d'une « tragédie inexcusable », déclaration importante, car c'est la première fois que la France reconnaît un massacre colonial, mais jugée insuffisante certainement par rapport à la promulgation, quelques jours auparavant, de la loi du 23 février glorifiant la positivité du colonialisme. Le président Chirac, le 21 juillet 2005, à Madagascar, a parlé du « caractère inacceptable des répressions engendrées par les dérives du système colonial ». Son successeur, Nicolas Sarkozy, le 5 décembre 2007 à Constantine, a déclaré : « Le déferlement de violence, le déchaînement de haine qui, ce jour-là (20 août 1955), submergea Constantine et toute sa région et tua tant d'innocents étaient le produit de l'injustice que depuis plus de cent ans le système colonial avait infligée au peuple algérien ». Et enfin il y a quelques jours, Bernard Bajolet, ambassadeur de France en Algérie, déclare à Guelma : « Le temps de la dénégation (des massacres du 8 Mai 45) est terminé, elle a fait insulte aux principes fondateurs de la République française et marqué son histoire d'une tache indélébile. » Dans cet ordre d'idées, Gilles Manceron dira : « Quand ce n'était pas le black-out, la relation des faits était loin de correspondre à la réalité. L'armée française manipulait l'information, c'est elle qui a photographié sur son lit d'hôpital à Sétif un Européen les deux mains amputées et diffusé abondamment ce cliché ainsi que les informations sur les autres victimes en se gardant bien de donner les éléments de la répression. » Et d'ajouter : « En France, l'information sur les exactions du 8 mai 45 à Guelma, Sétif et Kherrata étaient tout aussi orientées, car parlant d'agents hitlériens à la solde du fascisme. » Le professeur Jean-Luis Planche de l'université de Paris consacre sa communication « Le massacre du Constantinois en mai-juin 1945 vu par les services de renseignements américains ». Ainsi, l'Office of Strategic Services (OSS) à Alger à travers la Jicame (Joint Intelligence Collection Agency for Africa and Middle East) reste un des postes les plus importants de l'OSS, la plus vaste agence de renseignement des Alliés, et la première dont les Etats-Unis se soient dotés (à ne pas confondre avec la CIA). Cette dernière lors de ces missions rapporte, selon Jean-Luis Planche, qu'à Alger, le 13 juin 1945, la police coloniale française avait affecté une voiture de patrouille à un service de « 24h/24 ». C'est une conduite intérieure sans signe distinctif qui transporte cinq hommes, chacun armé d'une mitraillette. Ils ont ordre d'observer tout trouble éventuel créé par des indigènes et de tuer ceux-ci sans quitter la voiture. Les docteurs et professeurs Mohamed Saïdi, Abdelmadjid Merdaci, Mohamed El Korso, entre autres, ont retracé tour à tour les événements qui ont ponctué les massacres du 8 mai 45, dans la diplomatie, la politique et même la fiction, pour Merdaci, à travers le livre de Zamponi, Le bourreau de Guelma.