Un Algérien est expulsé toutes les cinq heures d'Europe. Il s'agit là d'une estimation faite par le sociologue Mohamed Saib Musette, spécialiste des questions migratoires, en se basant sur des données recueillies durant l'année 2007. Cela représente une moyenne de 5 Algériens par jour et 150 par mois. Les expulsions se font conformément aux accords de réadmission que l'Algérie a signés bilatéralement avec un certain nombre de pays européens comme l'Allemagne (1999), l'Italie (2000), Malte (2001), la France (2003), l'Espagne (2004) et l'Angleterre (2006). Depuis la signature de ces accords, relève M. Musette, la délivrance du « laissez-passer » par les consulats algériens en Europe ne fait que progresser d'année en année. Selon ce chercheur au Centre de recherches sur l'éducation, l'apprentissage et la didactique (Cread) d'Alger, il y a une moyenne annuelle d'un peu plus de 6000 « laissez-passer » délivrés par l'Algérie pour l'ensemble des pays européens, y compris la Turquie, entre 2002 et 2004. La délivrance de ces « laissez-passer » ne signifie cependant pas systématiquement un retour forcé au pays, précise le chercheur. Le nombre le plus important de « laissez-passer » est, bien entendu, délivré pour la France, où vit la plus grande communauté algérienne à l'étranger. Les Algériens représentent, en effet, une moyenne 23% de l'ensemble des personnes susceptibles d'être expulsées de France. Aussi, indique M. Musette, la France totalise, à elle seule, 50% des Algériens qui devaient être expulsés ces dernières années d'Europe. Les expulsions concernent généralement ceux qui sont entrés « illégalement » ou « irrégulièrement » dans le territoire français ou européen. Ou encore ceux qui sont entrés légalement, mais qui se retrouvent, au bout d'un temps en situation irrégulière ou « sans papiers ». Pour mieux illustrer cette situation, M. Musette se réfère au rapport publié en 2007 par le Comité intermouvements auprès des évacués (Cimade), une association qui intervient au bénéfice des étrangers retenus en centre de rétention administrative, selon lequel plus de 4297 Algériens, dont 118 femmes, ont transité par les centres de rétention en France. M. Musette estime que ce chiffre est le plus important par nationalités, précisant que « les personnes internées pour une durée de 32 jours en France font ensuite l'objet de différentes mesures, selon les cas, d'expulsion ». Notre interlocuteur fait remarquer cependant que les statistiques des Algériens objets d'une expulsion de l'étranger et réellement expulsés vers l'Algérie ne sont pas diffusées par les autorités algériennes. Le nombre d'expulsions risque d'augmenter si le projet de directive européenne sur la rétention et l'expulsion des personnes étrangères venait à être adopté par le Parlement européen. Pour M. Musette, l'Algérie aura fort à faire car elle n'a pas encore engagé les négociations pour un accord global de réadmission avec l'UE ni encore pour le programme dit de « bon voisinage ». Le risque serait, soutient-il, élevé pour les ressortissants algériens en situation irrégulière dont on ignore l'ampleur en Europe.