Le limogeage de l'ex-PDG d'Algérie Télécom, Mouloud Djaziri, serait intervenu suite à une injonction du secrétariat général de la présidence de la République. C'est, du moins, ce qu'a révélé hier le concerné qui avoue qu'après avoir été convoqué jeudi dernier au siège du ministère de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication, Boudjemâa Haïchour, qui était en compagnie de son secrétaire général, lui a signifié qu'il avait été mis fin à ses fonctions « suite à un appel téléphonique de la présidence de la République ». La veille, mercredi, le PDG d'Algérie Télécom, accompagné du DFC et du DAG de la compagnie ont été convoqués par le ministre à un conseil d'administration pour avaliser le payement de « certaines factures d'un montant de 6 millions de dinars se rapportant à des travaux faits » qu'il a refusées de signer, car, explique-t-il, « elles sont entachées d'irrégularités ». M. Djaziri qui nous a rendu visite hier à la rédaction précise, en ce sens, qu'il s'agit d'un passif qui remonte à 2005. M. Djaziri se défend contre les accusations de mauvaise gestion de l'entreprise et des ressources humaines formulées à son encontre par ses détracteurs : « Sachez que j'ai été limogé en laissant derrière moi une entreprise qui affiche un bilan positif. Comprenez que mon seul tort était d'avoir refusé certaines injonctions et pressions du ministère de tutelle. Lorsque j'étais en fonction, mon seul objectif était la défense des intérêts de l'entreprise. » Interrogé sur la nature de ces injonctions, notre interlocuteur s'est contenté de dire : « J'ai constaté plusieurs cas d'injonction » et que par conséquent, a-t-il soutenu, son limogeage était bel et bien « prémédité ». « On m'a poussé vers la porte de sortie malgré le fait que j'ai obtenu de bons résultats au cours du premier trimestre à la tête du groupe », a insisté M. Djaziri qui sera vraisemblablement remplacé par Moussa Benhamadi, ancien directeur du Centre de recherche sur l'information scientifique et technique (Cerist). Algérie Télécom n'aura pas connu de « stabilité » depuis la fin du mois de décembre 2007. Contactée par nos soins, une source de la présidence de la République a toutefois démenti cette version des faits et a expliqué que « cette affaire relève exclusivement des compétences du ministère de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication ». La même source a nié toute immixtion de la Présidence dans ce dossier. Un responsable du ministère de la Poste et des TIC, qui a requis l'anonymat, a avoué hier ignorer, à ce jour, les raisons du limogeage de M. Djaziri. « Je ne détiens pas d'éléments fiables par rapport à ce dossier », a indiqué notre interlocuteur qui précisera néanmoins que « tout ce qui a un rapport avec des factures relève de la commission des marchés, une structure du ministère ». La même source indiquera que « le conseil d'administration de l'AT se réunira aujourd'hui pour se prononcer dans le fond sur le cas de M. Djaziri ». A rappeler que Boujemâa Haïchour a fait tomber au moins quatre « têtes » à Algérie Télécom et dans les filiales du groupe. La dernière en date, celle de Mouloud Djaziri, qui est un ancien cadre du secteur des télécoms – 33 ans de service – a constitué pour beaucoup d'observateurs une énorme surprise. Celui-ci a remplacé l'ex-PDG, Slimane Kheïreddine, qui avait lui aussi fait les frais du premier responsable du département de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication. Kheïreddine Slimane n'avait pas lui aussi duré longtemps à la tête d'Algérie Télécom. Celui-ci a été remercié 17 mois après sa nomination. Décidément, les PDG d'Algérie Télécom sont assis sur des chaises éjectables, et ce, depuis la dernière semaine de décembre 2007 avec l'arrivée à la tête de Mobilis, la filiale de téléphonie mobile d'AT, de Lounis Belharat. Celui-ci était, depuis 2006, directeur commercial et marketing de Mobilis. Il a succédé à Hachemi Belhamdi, parti à la retraite. Quelques jours plus tard, le 30 décembre, Ahmed Kheili, directeur général adjoint de l'opérateur, était nommé PDG de la filiale Algérie Télécom Internet, Djaweb. Il succède à Houria Attif, en place depuis dix-huit mois et nommée conseillère du président. « Des progrès importants ont été enregistrés, notamment dans le domaine de l'infrastructure, mais il n'en demeure pas moins qu'Algérie Télécom n'a pas su fructifier tous ses atouts et ses capacités ainsi que le savoir-faire de son potentiel humain pour qu'elle soit compétitive tant sur le plan national qu'international », a expliqué le ministre, le 3 janvier, tout en reconnaissant que les personnes remerciées n'ont pas démérité. Ce qui est certain est que ces changements en cascade à la tête d'Algérie Télécom ne manqueront pas de porter atteinte à l'image de marque de l'une des plus grandes entreprises du pays.