L'évasion fiscale en Algérie a pris des proportions inquiétantes. L'administration fiscale a recensé 10 324 importateurs fraudeurs jusqu'au 13 avril 2008, date de la dernière actualisation opérée sur le Fichier national des fraudeurs (FNF). C'est un chiffre effrayant à plus d'un titre. Les statistiques vont encore crescendo. Pour preuve, au 30 septembre 2007, la liste du FNF comprenait 9960 importateurs fraudeurs, tandis que l'autre actualisation effectuée en novembre 2007 montrait une barre qui avait atteint 10 051 importateurs défaillants, appelés aussi dans le jargon fiscal « personnes physiques et morales auteurs d'infractions à la législation fiscale, douanière, commerciale et bancaire ». La courbe est de tendance ascendante et menace d'atteindre encore un volume plus important. Les importateurs figurant sur le FNF, accessible à toutes les instances bancaires, fiscales et celles en charge de la régulation, sont carrément interdits d'activité et leurs domiciliations bancaires sont bloquées de facto, apprend-on auprès d'une source proche de l'administration fiscale. Cette instance a été dotée d'un nouvel arsenal juridique lui permettant de mieux lutter contre l'évasion fiscale.A titre d'exemple, l'article 13 de la loi de finances complémentaire 2006 demande à l'administration fiscale de mentionner le numéro d'identification fiscale, le numéro du registre du commerce, les nom, prénom et adresse du gérant ou dirigeant.De même, il conviendra de mentionner le type de la fraude, la date de l'infraction, le détail de la fraude, les chiffres d'affaires et les droits correspondants à la date de dépôt de plainte, la date et le contenu de la décision rendue, le paiement de la dette (oui ou non), la date du retrait du FNF et la situation juridique (contentieux fiscal, instance d'instruction, appel/nouvelle décision). Mais il se trouve que des dysfonctionnements existent entre les différentes instances chargées de réprimer l'évasion fiscale. Explication : l'importateur est appelé, en premier lieu, à être reçu par le receveur des impôts pour les besoins de justification de l'encaissement de la taxe dans le cadre d'attribution d'une attestation de domiciliation bancaire d'importation. Cela étant l'exemplaire n°1 que comprendra la démarche administrative de l'importateur. Les exemplaires n°2 et n°3 sont remis par le contribuable à sa banque. Cette dernière doit impérativement vérifier la concordance des renseignements contenus dans l'attestation avec ceux figurant dans le dossier de demande de domiciliation. La non-concordance desdits renseignements constitue un motif de rejet de la demande de domiciliation. Dans le cas d'une concordance, l'exemplaire n°2 est conservé par la banque, alors que le n°3 doit être retourné par la banque à la direction des impôts. Cependant, il se trouve qu'un retard énorme est accusé dans le règlement de cette dernière procédure qui consiste à envoyer l'exemplaire n° 3 à l'inspection en charge du dossier fiscal. Entre-temps, le contribuable (importateur) bénéficie de plusieurs autres domiciliations sans que l'administration fiscale puisse mettre la main sur sa nouvelle adresse. Cette lenteur fait que les importateurs changent d'adresse lors de chaque nouvelle opération d'importation, et ce, pour fuir le fisc, précise encore notre source qui a préféré garder l'anonymat. Ainsi, les 10 324 importateurs fraudeurs recensés par la direction générale des impôts (DGI) sont à l'origine d'une importante fuite fiscale, d'un préjudice énorme pour le Trésor public.