Le tribunal de Béjaïa a mis en délibéré pour le 3 juin l'affaire dans laquelle de nombreux responsables de la direction de l'OPGI sont accusés notamment de « dilapidation de deniers publics » et « passation de marchés contraire à la réglementation ». Le ministère public a requis une peine de 5 ans de prison contre le DG de l'office et trois de ses collaborateurs et 3 ans pour le reste des accusés. Après deux reports, le procès a démarré dans l'après-midi de mardi pour se prolonger jusque dans la soirée après qu'ont défilé devant la barre 15 témoins, 8 avocats de la défense et surtout 13 accusés dont les responsables d'un bureau d'études privé et de deux entreprises de gardiennage et d'entretien, qu'une lettre anonyme a réussi à faire incriminer après que le parquet général s'est autosaisi de l'affaire. Le premier grief concerne la passation d'un marché de gré à gré avec trois entrepreneurs de Constantine d'où est originaire le DG, pour un chantier de 50 logements sociaux participatifs (LSP) à Tala Ouariane, dans la ville de Béjaïa. Pour l'accusé, ne sont soumis au code des marchés publics que les projets que finance l'Etat, soit les logements sociaux et à condition de dépasser le seuil des 6 millions de dinars. Des avis d'appels d'offres ont été lancés pour ces 50 unités et ont été déclarés infructueux. Les entrepreneurs constantinois ont fait partie des soumissionnaires. « Ailleurs, ce genre de marché ne passe pas par la commission des marchés sauf ici à Béjaïa parce que je l'ai voulu, bien que la loi ne m'y oblige pas », s'est-il défendu. Le marché des 50 logements a été divisé en trois lots d'un peu moins de 6 millions de dinars chacun. Le chef d'agence défie son supérieur Pour le représentant du parquet général, cela n'est pas innocent. « C'est pour échapper au code des marchés », accuse-t-il. Le DG a soutenu qu'il a agi suite à un conseil du bureau d'études qui l'avait alerté en février 2005 sur le danger d'un affaissement de terrain. Selon l'accusation, les trois entrepreneurs ont bénéficié d'une prise en charge sur le compte de l'OPGI en occupant un F1 (un type de logement dont l'attribution est gelée par arrêté) de l'office à la cité des 200 Logements à Iheddaden. Pour la confrontation, la juge fait appel à un témoin à charge : le chef d'agence de Nacéria. « C'est le DG qui m'a téléphoné pour me demander de préparer le F1. Une fois la peinture et les raccordements de l'électricité et de l'eau faits, je lui ai remis les clés », témoigne l'employé qui défie son supérieur hiérarchique. « Je démens. Mes instructions sont faites par écrit », se défend le DG qui a fait annuler, plus tard, auprès de Sonelgaz et de l'ADE les abonnements de l'électricité et de l'eau, après « s'être aperçu », dit-il, de leur existence. L'accusation a porté aussi sur la vente de gré à gré de 126 locaux commerciaux dans la wilaya. Le DG ne le nie pas mais l'explique par une instruction ministérielle l'« autorisant à recourir à une vente libre après deux adjudications infructueuses ». A son arrivée à Béjaïa en 2004, il a procédé à l'annulation de la commission interne de gré à gré qui y a existé et qu'il considère comme « une commission de complaisance ». La partie civile absente Le tribunal a interrogé les accusés sur le cas notamment d'une facture de février 2006 relative au nettoyage de blocs de logements dans la zone d'Akbou qui n'auraient pas été faits, selon un des responsables au niveau de l'agence d'Akbou. « L'entretien n'a jamais existé depuis le départ de la première entreprise en 2005 », déclare le témoin à charge. Principale explication des accusés et de leur défense : « La tournée faite par l'agence d'Akbou a concerné les seuls blocs non concernés par l'entretien parce que les locataires ne s'acquittent pas de leurs charges. » A Amizour, c'est le cas des honoraires d'un bureau d'études chargé du suivi d'un projet de 100 logements et des VRD qui pose problème. Le montant est excessif pour le responsable du service des marchés qui a refusé de le cautionner parce que « dépassant celui facturé habituellement ». « Un mettreur et un TS c'était largement suffisant », soutient-il. Le bureau d'études avait dépêché un TS et un ingénieur pour 100 000 DA/mois. Un acte de gestion « légal » aux yeux des responsables de l'OPGI qui se sont défendus d'avoir transgressé la loi en recourant à un privé pour l'achat de liège pour un coût un peu plus cher que celui pratiqué par l'entreprise publique, le fournisseur habituel de l'office. Par ailleurs, dans ce procès, le grand absent a été la partie civile qui a manqué de représentant. Le juriste de l'OPGI s'est présenté à l'audience comme tel mais sans l'« habilitation » de sa tutelle, ce qui l'empêche de défendre les intérêts de l'office.