Les vaches laitières étaient hier à l'honneur au Salon international du lait et dérivés (Silait) qui a ouvert ses portes hier à la Société algérienne des foires et expositions (Safex) aux Pins maritimes, Alger. Elles avaient occupé le devant de la scène bien avant en raison des perturbations que connaissent les éleveurs qui sont confrontés à la cherté de l'aliment de bétail. Certains d'entre eux étaient présents au Silait et criaient à qui veut les entendre les contraintes qui les poussent à faire le choix difficile de réduire leur cheptel afin de pouvoir maintenir leur activité. J'ai vendu 20 têtes sur les 42 que je possédais, car je ne pouvais plus assurer leur ration », témoigne sur un ton triste Khelifati Bejaoui, 68 ans, éleveur de bovins à Cherarba (Alger) qui sillonnait, l'air hagard, les différents stands du Silait. Il explique qu'avec la hausse des prix des intrants qui entrent dans l'alimentation des bovins, il n'arrive plus à entrer dans ses frais. Ainsi, le prix du son a atteint les 2000 DA, celui du maïs dépasse les 2600 DA alors que l'aliment de bétail est cédé à pas moins de 3000 DA. « Je perçois sur un litre de lait 37 DA dont 7 DA de subvention, alors que le prix de revient est d'environ 45 DA. La subvention doit se situer entre 15 et 20 DA », assure-t-il. Laâssifer Ahmed, éleveur à Constantine, a dû lui aussi se délester d'une trentaine de ses vaches pour faire face à la flambée de l'aliment de bétail. Cette décision a été douloureuse pour cet agriculteur. « Je m'en occupais mieux que de mes propres enfants », raconte-t-il. Le drame de ces éleveurs vient aussi de la sécheresse, mais surtout de la réduction substantielle des surfaces fourragères. Il faut dire que la plupart de ces exploitants agricoles n'ont pas de terres et sont obligés d'avoir recours à la location pour pouvoir nourrir leurs cheptels. Une production Déficitaire Le problème du foncier se pose donc également de façon cruciale pour cette branche de l'agriculture. « Avant, on louait les terres des exploitations agricoles collectives, mais celles-ci sont de plus en plus englouties par le béton », note M. Khelifati. Les aléas énumérés par ces éleveurs risquent de freiner l'évolution de la production nationale de lait déjà déficitaire. Elle s'est établie à 2,2 milliards de litres en 2007 alors que les besoins en consommation nationale sont estimés à 3,5 milliards de litres. Selon des données officielles, seuls 300 millions de litres sont collectés. Il apparaît difficile dans un tel contexte de substituer l'importation de lait en poudre par la production locale. Et pourtant, il va bien falloir avec la flambée des cours de ce produit boursier réfléchir à des mécanismes pour améliorer la productivité nationale. Selon le directeur général de l'Office national interprofessionnel du lait et ses dérivés (Onil), Benyoucef Mohamed Tahar, une coordination est en train de se mettre en place pour soutenir le lait cru local. « L'Onil a été créé officiellement pour développer la production nationale », soutient ce responsable. Le président de la Chambre de l'agriculture (CNA), Mohamed Cherif Ould El Hocine, estime, de son côté, qu'il est temps que la filière lait figure parmi les priorités du gouvernement tout en rappelant que cette activité emploie plus de 380 000 personnes. Selon lui, les efforts devraient être concentrés sur 22 wilayas où il y a un très fort potentiel. Le président de la CNA soulèvera également un autre problème qui se pose aussi bien pour l'élevage bovin qu'aux autres élevages. Il s'agit de l'absence de traçabilité. « Toutes les vaches devraient avoir un matricule comme les véhicules », souligne-t-il. « Nous avons un excédent d'ovins dont le cheptel a atteint les 20 millions de têtes, mais on ne peut pas les exporter ou exporter leur viande, car les autres pays exigent des certificats avec tous les renseignements sur ces animaux. Ce genre de certificats n'existe pas en Algérie », regrette-t-il.