Ceux qui pensent encore que l'Algérie n'est capable d'exporter que du pétrole et du gaz sont invités à revoir leur jugement après le succès retentissant enregistré, hier, par les produits agroalimentaires « made in Algeria », exposés à la Foire africaine 2008 de Yokohama (African Fair 2008), une manifestation organisée parallèlement aux travaux de la quatrième TICAD. Depuis l'ouverture de ce rendez-vous commercial – conçu pour encourager les entreprises africaines à se frayer un chemin sur les marchés japonais et asiatiques – le stand de l'Algérie, co-animé par M. Sanhadji, représentant de la SAFEX et M. Ghezal de Sonatrach, ne désemplit pas. Venus nombreux à cette foire, à la laquelle ont participé près d'une vingtaine d'entreprises algériennes privées et publiques, les habitants de Yokohama et de Tokyo ont montré un intérêt inattendu pour notre plat national : le couscous. Les Algériens, qui ont l'habitude de sous-estimer la qualité de leurs produits locaux, seront également surpris d'apprendre que nos jus, nos vins, notre huile d'olive et nos dattes font partie aussi des produits particulièrement prisés au pays du Soleil-Levant. Ce n'est pas tout. L'Algérie – en dépit de la mauvaise publicité occasionnée par les dix années de terrorisme qu'elle a endurées – reste un pays qui jouit dans certains milieux japonais d'un préjugé favorable. Dans le cas où cet « avantage comparatif » est intelligemment exploité, certaines entreprises algériennes pourront aspirer à se faire une place au soleil dans un marché japonais fort de 120 millions d'habitants et qui affiche actuellement une boulimie effarante pour les produits étrangers. La remarque est valable particulièrement pour les produits agricoles et agroalimentaires. C'est ainsi que des entreprises, telles que SIM, Ifri, Vita-Jus et l'ONCV, pour ne citer que celles-ci, peuvent avoir leur mot à dire en Asie avec un marketing plus agressif. Actuellement, c'est justement à ce niveau-là que réside le talon d'Achille de l'Algérie. Car, s'il fallait noter les pays sur les différents aspects liés au commerce, l'Algérie aurait certainement eu un zéro pointé en marketing et en communication. L'Algérie toujours invisible en Asie Certains efforts ont quand même été accomplis. L'actuel ambassadeur d'Algérie à Tokyo, Sid Ali Ketrandji, semble avoir, par exemple, réussi la prouesse de redorer, en relativement peu de temps, l'image du pays auprès des autorités japonaises qui, d'ailleurs, ne disent que le plus grand bien de lui. Mais comme on dit chez nous, « une seule main ne peut applaudir ». Aussi, est-il attendu avant tout du gouvernement de faire preuve de plus d'imagination et de prendre plus d'initiatives pour transformer l'intérêt manifesté à l'égard du pays par le Japon et d'autres pays en résultats concrets et si possible en devises fortes. En attendant, il est à constater que l'Algérie reste un pays inconnu pour le Japonais lambda. Comme aux Etats-Unis d'Amérique et ailleurs, l'Algérie est souvent confondue avec le Nigeria à Tokyo, preuve sans doute que les discours triomphalistes des décideurs politiques sur le fameux retour de l'Algérie sur la scène internationale, ressassé à chaque occasion, ne portent pas plus loin que la Méditerranée. En revanche, nos voisins, Tunisiens et Marocains, n'ont pas besoin à chaque fois de sortir une carte géographique pour expliquer à un Japonais où se trouve leur pays. Par conséquent, il y a beaucoup à redire sur la politique de promotion des investissements et la stratégie (si stratégie il y a), adoptées par le gouvernement, lesquelles sont supposées participer à mieux « vendre » la destination Algérie et le label « made in Algeria ». Pour preuve, n'était le sacrifice consenti, à la dernière minute, par la SAFEX pour faire en sorte à ce que l'Algérie soit présente à cette manifestation, personne n'aurait pensé à aller au Japon pour placer les entreprises publiques et privées algériennes. Il est clair que ce n'est pas en restant à longueur de journée dans les salons feutrés du gouvernement, sis rue Dr Saâdane, que l'on peut faire de bonnes affaires avec le reste du monde. M. Sanhadji de la Safex regrettera, à ce propos, le fait que l'Algérie ne se soit pas suffisamment battue pour disposer d'un stand plus grand et ne s'est pas donnée les moyens pour mieux exploiter les opportunités offertes par l'African Fair 2008. Les animateurs du stand algérien — qui ont reçu la visite et les encouragements d'Ahmed Ouyahia, le représentant spécial du président Bouteflika à la TICAD IV, et d'Abdelkader Messahel, le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines — regrettent aussi « l'éparpillement » des opérateurs privés. Une situation, ont-ils dit, qui « leur fait fatalement rater des opportunités en or ». En espérant que les autorités daignent se secouer et s'investissent un peu pour donner une plus grande chance à la production nationale de conquérir des marchés extérieurs, nos produits locaux ne comptent, pour l'heure, que sur leurs seules qualités intrinsèques pour s'imposer. Et les consommateurs étrangers les trouvent bons… n'en déplaise à ceux qui soutiennent dur comme fer que l'Algérie est un pays qui n'a pas d'avenir dans l'agriculture.