Les Américains ont dû certainement prendre acte du positionnement mercredi dernier de l'Assemblée générale de l'ONU clairement en faveur du secrétaire général des Nations unies. Pour la première fois depuis des semaines, Washington a quelque peu clarifié sa position effaçant d'un revers toutes les accusations portées contre Kofi Annan et pour lesquelles il était poussé vers la sortie, sinon vers la prison. Kofi Annan se trouvait conforté jeudi soir face à ses détracteurs après avoir reçu un soutien clair, quoique tardif, des Etats-Unis. L'ambassadeur américain à l'ONU, John Danforth, a spécialement convoqué la presse pour lever l'équivoque : les Etats-Unis, a-t-il dit, « ne cherchent pas à pousser M. Annan à la démission ». Le secrétaire général « a fait du bon travail », « il nous tarde de continuer à travailler avec lui », « nous (lui) exprimons notre confiance pour qu'il continue dans ses fonctions », a ajouté M. Danforth. En même temps, a-t-il dit, l'enquête sur le scandale de corruption entourant l'ex-programme « pétrole contre nourriture » de l'ONU en Irak est « vraiment importante ». « Il y a un nuage au-dessus des Nations unies, cela ne fait aucun doute. Pour dissiper ce nuage, il faut laisser passer la lumière, c'est-à-dire une enquête complète et objective, sans idée préconçue, et une coopération totale de tous à l'enquête », a précisé l'ambassadeur américain. « Personne, à ma connaissance, n'a mis en doute l'intégrité personnelle du secrétaire général. Personne. Et nous ne l'avons certainement pas fait », a ajouté M. Danforth, qui a précisé avoir ainsi voulu corriger l'impression laissée par certaines de ses précédentes déclarations. Par deux fois par le passé, M. Danforth avait éludé la question de savoir s'il « soutenait » M. Annan, se contentant d'affirmer que l'affaire « pétrole contre nourriture » était « sérieuse » et que l'enquête devrait être « complète et transparente ». Le président George W. Bush avait eu la même attitude, ajoutant même une menace voilée de remettre en cause le financement de l'ONU par son pays si la confiance des contribuables américains envers l'organisation devait disparaître. Washington finance près du quart (22%) du budget de l'ONU. « Mes propos ont, semble-t-il, été interprétés comme une marque de défiance envers le secrétaire général, c'est pourquoi j'ai estimé que je devais clarifier notre position », a expliqué M. Danforth. M. Annan était attaqué depuis près de deux semaines par une partie de la presse et de la classe politique américaines, des parlementaires républicains allant jusqu'à demander sa démission, à propos de l'affaire « pétrole contre nourriture ». Selon l'accusation non encore établie, ce programme en vigueur de décembre 1996 à novembre 2003 a été perverti par le régime et plusieurs milliards de dollars en ont été détournés. Les attaques contre M. Annan se sont précisées après la révélation que son fils, Kojo, avait été payé jusqu'en février 2004 par une compagnie suisse ayant participé au programme, qu'il avait pourtant quittée en 1998. Celle-ci, la Cotecna, a toutefois affirmé que Kojo Annan n'avait rien eu à voir avec le contrat qu'elle avait obtenu dans le cadre du programme. Mais Kofi Annan a reconnu que cet aspect de l'affaire créait un « problème de perception » pour l'ONU. C'est là justement où intervient cette ovation de l'Assemblée générale de mercredi. Celle-ci était tellement chaleureuse et insistante qu'elle a fini par avoir valeur de vote. Ou plutôt de plébiscite.