Pouvez-vous nous définir ce qu'est la maladie cœliaque ? La maladie cœliaque est une entéropathie auto-immune déclenchée par l'ingestion du gluten chez des sujets génétiquement prédisposés. Tantôt invalidante, tantôt asymptomatique, elle doit être, selon le cas, diagnostiquée ou dépistée afin d'éviter les complications qui, dans un cas comme dans l'autre, entraînent un accroissement de la morbidité et de la mortalité. Peut-on connaître le nombre de malades cœliaques en Algérie ? Pour le moment, on ne peut avancer des chiffres exacts concernant la fréquence de la maladie en Algérie, mais cela dépasse les 500 000. Il n'y a pas de système de collecte d'informations spécifiques à ce type de maladie. Par contre, je peux affirmer que le nombre d'intolérants au gluten est en nette augmentation, et bien qu'elle soit souvent non identifiée, la maladie cœliaque évolue considérablement dans notre pays. Nous sommes au sommet de l'iceberg. Mais avec l'avènement des marqueurs cœliaques (anticorps-antigliadine, anticorps-antitransglutaminose, anticorps-endomysium), on peut diagnostiquer des formes beaucoup moins expressives (des formes frustrées, latentes et même potentielles). Le deuxième élément qui permet de diagnostiquer la maladie consiste en des biopsies intestinales par le biais de l'endoscopie. Serait-elle d'origine génétique ? Concernant son origine, nous pouvons affirmer l'existence de traits génétiques associés à la maladie. Nous ne pouvons avancer son caractère héréditaire. Mais si on n'arrive pas actuellement à déterminer sur le plan scientifique la nature génétique exacte de la maladie, l'on décrit toutefois des agrégations familiales qui laissent à penser qu'il y a un mécanisme génétique. On pense souvent que les complications sont parfois les seuls signes d'appel. Qu'en est-il au juste ? La maladie cœliaque peut rester asymptomatique pendant des années tout en exposant insidieusement les malades aux risques de complications. De récentes études ont fait ressortir que dans plusieurs pays, dont l'Algérie, environ 9 malades sur 10 ne sont toujours pas identifiés. Parfois dues aux carences, parfois dues aux cytokines produites par des réactions immunitaires inappropriées, parfois encore inexpliquées, elles peuvent toucher différentes sphères. Le retard statural et/ou pondéral chez l'enfant, la petite taille chez l'adulte, un état de dénutrition, une ostéoporose (présente chez 28% des cœliaques au moment du diagnostic) avec ou sans fractures pathologiques, une hypoplasie de l'émail dentaire, s'expliquent par la malabsorption. Les complications neurologiques concerneraient 5 à 10% des cas et comprennent l'épilepsie avec des calcifications cérébrales (maladie cœliaque dans 50 à 80%), l'ataxie (maladie cœliaque présente dans 13 à 16%), les myopathies, les neuropathies périphériques, la démence, des leuco-encéphalopathies multifocales progressives. Les troubles psychiatriques, déjà cités dans les symptômes, comprennent la dépression pouvant mener aux tentatives de suicide, mais également la schizophrénie (11). Enfin, les cancers gastro-intestinaux comprennent l'adénocarcinome mais, surtout, le redoutable lymphome non hodgkinien à cellules T, dont le risque est multiplié par six. Existe-t-il des médicaments spécifiques à son traitement ? Pour l'instant, la cœliaquie ne nécessite pas de médication. Le seul traitement efficace à ce jour consiste à supprimer totalement et définitivement le gluten de l'alimentation. Une consultation chez un diététicien s'impose au moins pour le démarrage du régime. Ce régime est très contraignant au plan économique pour l'environnement familial et au plan psychologique pour le malade cœliaque, car l'adhésion à un régime est souvent difficilement acceptée. C'est là que peuvent intervenir les associations de patients. Ces associations constituent une aide précieuse pour les malades et leurs familles. C'est d'ailleurs ce à quoi nous sommes en train d'œuvrer. Je peux toutefois affirmer qu'il existe des voies balbutiantes pour mettre au point un médicament destiné au traitement de cette maladie pour éviter aux malades son contraignant poids financier. C'est au stade très avancé de la recherche.