La situation du livre a été hier, à l'hôtel El Djazaïr, au centre d'une rencontre conviviale avec la ministre de la Culture, Khalida Toumi. Initiée par Smain Amziane, directeur des éditions Casbah et président du Syndicat national des éditeurs de livre (SNEL), cette rencontre a permis de procéder à l'évaluation d'un secteur encore tributaire d'un certain nombre de pesanteurs bureaucratiques qui constituent un frein à son affirmation sur la scène culturelle algérienne et internationale. Les éditeurs en Algérie soulignent de manière récurrente leurs difficultés à rendre pérennes leurs activités du fait des surcoûts qui pèsent sur le processus de fabrication du livre. Dans leur grande majorité, les maisons d'édition en Algérie tirent leurs ouvrages dans des proportions minimes qui oscillent entre 1500 et 2000 exemplaires, ce qui n'assure même pas un retour sur l'investissement compte tenu du fait qu'il y a un taux d'invendus, y compris pour ces tirages quasi confidentiels. Cela, entre autres effets, d'empêcher la lecture à hauteur des effectifs de populations alphabétisées. Agir sur la fiscalité pourrait constituer un facteur incitatif majeur dans l'émergence d'un marché du livre plus accessible à un produit dont la cherté est aujourd'hui dissuasive. La ministre de la Culture, en réponse aux préoccupations des éditeurs, exprimées notamment par la voix du président du SNEL, a fait valoir les mesures fondatrices que met en œuvre son département, à l'image de la création, qu'elle juge essentielle, d'un centre national du livre, la mise en place d'un réseau national de biblio-bus, acquis auprès de la Belgique, en plus de l'engagement ferme à l'achat d'un quota d'exemplaires auprès des éditeurs algériens. Le centre national du livre serait actuellement à une phase très avancée, le texte étant parvenu enfin au secrétariat général du gouvernement. La ministre de la Culture a également écouté les doléances des éditeurs concernant la participation algérienne aux salons internationaux du livre, indiquant notamment que l'éventualité de la prise en charge du transport des personnes et des livres n'était pas exclue à charge pour les éditeurs de financer la location de leurs stands. Ces assurances, bien accueillies par les éditeurs présents à cette rencontre qui se voulait informelle mais non moins marquée par un esprit de concertation tant il paraît évident que les problèmes du secteur ne peuvent pas être réglés de manière unilatérale. La complexité des questions à traiter est d'autant plus grande que le livre implique aussi, aux côtés du syndicat national des éditeurs et du ministère de la Culture, d'autres acteurs d'influence et de décision avec les ministères des Finances, du Commerce, de l'Intérieur et des Collectivités locales et des Affaires étrangères. Cette diversité d'intervenants indique que les stratégies du livre ne pourraient pas se suffire à elles-mêmes si elles n'étaient pas portées et accompagnées par une dynamique politique réelle et partagée. Khalida Toumi, qui a affirmé sa disponibilité à rendre possibles les contacts entre des éditeur et des ministres pour intervenir, à plus forte raison maintenant qu'ils constituent pour le gouvernement des interlocuteurs valables. Un esprit de dialogue rendu nécessaire par un état des lieux assez largement défavorable, en amont et en aval, au secteur du livre confronté à une durable crise de ressources qui condamne la majorité des éditeurs algériens à brider leurs ambitions. Ce qui explique une volonté clairement perceptible, de part et d'autre, de transcender le marasme chronique dans lequel se trouve le livre en Algérie.