Après le « feuilleton » de la pomme de terre et du lait, c'est au tour du blé, dont la production cette année s'annonce mauvaise. Répondant à une question d'un membre du Conseil de la nation lors d'une séance plénière jeudi, le ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Saïd Barkat, a annoncé qu'« il y aura cette année une baisse de la production de blé, comparativement à l'année dernière ». Sans donner de chiffres précis sur les prévisions arrêtées par les services agricoles, le ministre expliquera les raisons de cette baisse attendue « aux changements climatiques que connaît le pays ». Yaura-t-il une quelconque conséquence sur les prix du blé sur le marché national ? M. Barkat s'est voulu rassurant. Cela malgré le fait que de nombreux spécialistes algériens et étrangers soulignent la gravité de la situation. Selon lui, « des études et des consultations sont en cours au niveau des parties concernées pour fixer le nouveau prix du blé de manière raisonnable » et les résultats seront annoncés prochainement par le gouvernement. Il faut dire cependant que le blé et ses dérivés, fortement prisés par les ménagères, demeurent des produits inscrits sur la liste des produits à large consommation subventionnés par l'Etat. Les petites bourses seront donc, du moins pour l'instant, à l'abri d'une fâcheuse augmentation des prix. Cependant, pour le Trésor public, la situation risque de devenir assez compliquée vu que cette baisse de production annoncée va amener l'Etat à importer encore plus de blé. Un blé qui n'est pas toujours disponible sur les marchés mondiaux. Selon le ministre du Commerce, El Hachemi Djaâboub, jeudi dernier au Conseil de la nation, « l'Algérie importe la moitié de sa consommation de blé tendre et dur ». Et d'ajouter : « Nous importons annuellement près de 1,5 million de tonnes de céréales, de café et de sucre. » Grande importatrice de blé dur et tendre, l'Algérie achète annuellement plus de 5% de la production céréalière mondiale et devrait continuer, selon les experts, à importer d'importantes quantités en raison du faible rendement à l'hectare et aux problèmes climatiques que connaît le pays de façon intermittente. Ce sont d'ailleurs les conditions météorologiques que met en exergue la Commission canadienne du blé (CCB) pour expliquer, elle aussi, les perspectives de production mondiale de céréales en Afrique du Nord. Dans un communiqué rendu public jeudi dernier, la CCB affirme qu'« en Europe, les conditions météorologiques se sont améliorées par rapport à l'an dernier de sorte qu'on prévoit une production record de blé. Par contre, le manque d'eau qui a sévi en Afrique du Nord pendant la saison de croissance suscite des difficultés pour la récolte de blé dur, particulièrement en Tunisie et en Algérie ». Il va sans dire que cette contre-performance aura des répercussions sur l'enveloppe à débourser pour importer les quantités de blé manquantes, d'autant que les prix sur les marchés mondiaux des matières premières agricoles, en premier lieu le blé, ont connu ces derniers mois des hausses vertigineuses. Le directeur général de l'Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) a indiqué, dans un communiqué diffusé le 13 mai, que « la hausse sans précédent des cours mondiaux des produits agricoles, qui a mis à rude épreuve la sécurité alimentaire des pays pauvres, a été provoquée à la fois par de mauvaises récoltes, une augmentation de la demande en Asie, des coûts de transport en hausse, des restrictions commerciales et en matière de développement de cultures destinées aux énergies alternatives (biocarburants) ».Il dira cependant que l'Algérie a anticipé sur le marché « en sécurisant les approvisionnements dès les prémices de l'amenuisement de l'offre sur le marché mondial et de la flambée des cours des denrées alimentaires sur les marchés internationaux ». Plus globalement, la filière des céréales, selon M. Barkat, a connu une productivité meilleure ces dernières années grâce à la mise en valeur des terres. Il a estimé la production actuelle de céréales à 40 millions de quintaux par an, alors qu'elle ne dépassait pas 10 millions de quintaux par an avant 2000. Les besoins nationaux en cette denrée, a-t-il souligné, sont estimés cependant à 70 millions de quintaux par an, d'où le recours à l'importation pour assurer la sécurité alimentaire des citoyens.