La situation sécuritaire dans les pays du Sahel sera, au début du mois de juillet prochain, au cœur d'une importante rencontre de sept chefs d'Etat de la région, à savoir l'Algérie, le Mali, le Niger, le Tchad, le Burkina Faso, la Mauritanie et la Libye. Devant se tenir dans la capitale malienne Bamako, cette réunion à haut niveau de responsabilité se penchera sur la montée de l'insécurité qui multiplie les sources de fragilisation de la quiétude et de la paix dans la région et plonge les populations et les Etats dans la peur et les risques de déstabilisation. Terrorisme, banditisme et trafic en tout genre, rébellion et migrations clandestines sont des maux qui trouvent matière à conjugaison dans cette large bande frontalière difficile à contrôler et donnant du fil à retordre aux services de sécurité des pays voisins. S'étant appliqués séparément, du fait de dissensions et autres désaccords, à combattre ces sources de dégradation de la situation sécuritaire, les pays de la région semblent décidés à aller vers une coopération et une lutte commune afin d'arriver à des résultats probants pour une paix sûre, partagée et durable. « Cette rencontre doit permettre de développer une approche commune des problèmes qui affectent la bande sahélienne en vue de proposer des actions concrètes », a souligné hier Saïd Djinnit, représentant spécial du secrétaire général de l'ONU pour l'Afrique de l'Ouest (Unowa) lors d'un point de presse organisé à l'issue d'une réunion à Dakar avec les chefs des missions de paix de l'Onu en Afrique de l'Ouest. Les pays de la région sahélienne semblent arrivés à la conviction que la sécurité de l'un fait la sécurité de l'autre, une devise qui paraît fédérer ces voisins qui ont failli, en ne portant pas préalablement un intérêt suffisant au développement des territoires devenus aujourd'hui des zones de terreur. Les sept pays conviés par le Mali à se réunir autour d'une table de discussion sont tous touchés de près ou de loin par une ou de nombreuses facettes des péchés capitaux transformant la bande frontalière en une jonction de crimes. Le Niger, le Mali et le Tchad font face à des mouvements de rébellions qui déstabilisent grandement leur situation sécuritaire. L'annonce de la tenue de cette conférence intervient d'ailleurs à l'heure où le Tchad enregistre la prise d'une de ces villes de l'est par des rebelles. Le Mali et le Niger continuent d'être inquiétés par la montée des manifestations de la rébellion touareg. L'afrique de l'ouest, plaque tournante de la cocaïne L'Algérie et la Libye sont d'ailleurs mises à contribution pour éteindre le brasier de la colère touareg. Les tentatives de médiation sont fréquentes et le ballet diplomatique malien à Alger le prouve amplement. Dernière présence malienne en date à Alger est celle du ministre de la Défense et des Anciens combattants, intervenue après celles du ministre des Affaires étrangères et du président Amadou Toumani Touré. Les Maliens multiplient leurs apparitions dans la capitale algérienne prouvant ainsi qu'ils veulent en finir une fois pour toutes avec le conflit gangrenant la province de Kidal. C'est d'ailleurs à leur demande que le sommet regroupant les pays du Sahel se tiendra en juillet. L'Algérie a elle aussi intérêt à immuniser ses frontières sud, notamment contre la contrebande et le terrorisme. Il n'est un secret pour personne que le GSPC transformé en branche d'Al Qaïda au Maghreb détient des bases arrière dans les territoires sahéliens à partir desquelles il arrive à multiplier ses actions de terreur et à se replier sans être inquiété. Si la Mauritanie enregistre des attaques sporadiques du GSPC, deux otages autrichiens demeurent prisonniers des bandes terroristes repliées au Mali depuis février. « Le regain de tension dans la région sahélienne est la combinaison de plusieurs facteurs. Il y a des rébellions anciennes sur lesquelles sont venus se greffer de nouveaux phénomènes, le terrorisme, qui est présent dans la région mais surtout le trafic de drogue et le crime organisé qui se sont développés de façon très importante », indique le responsable onusien Saïd Djinnit. Ce dernier qualifie de très sensible et de confuse la situation dans la région du Sahel en s'interrogeant sur la connexion existant entre différentes formes de criminalité qui semblent trouver un terrain fertile dans cette zone de non-Etat et où se côtoient rocaille et trafiquants. « Est-ce qu'il y a des passages entre les réseaux de crime organisé, de trafic de drogue et de terrorisme et certains éléments de la rébellion ? Tout cela a créé une situation un peu confuse dans le Sahel », se demande Djinnit qui annonce l'organisation juste après ce sommet d'une conférence sur le trafic de drogue dans la région. A souligner que ce type de trafic trouve matière à prospérité en Afrique de l'Ouest qui est devenue une plaque tournante pour l'acheminement de la cocaïne sud-américaine vers les pays européens. La réunion de Bamako envisage d'asseoir un climat de dialogue serein où l'on tentera de convaincre les différents chefs d'Etat à laisser de côté les questions qui fâchent et les tensions bilatérales pour arriver à des solutions communes. Il est utile de souligner que la paix ne se gagne pas seulement au prix de la guerre mais surtout au prix de la prospérité économique. Le Sahel est l'une des régions les plus pauvres et déshéritées qui a été livrée aux brigands. La prospérité sociale et économique devra figurer parmi les volets de discussions entre les dirigeants africains. Une mise en bouche sur la teneur des travaux de ce sommet est attendue cette semaine à travers la tenue d'un autre sommet devant réunir pour sa part les 25 pays de la communauté des Etats sahélo-sahariens (Cen-Sad), et ce, les 17 et 18 juin au Bénin.