Ils sont environ 1 000 habitants, pour la plupart sans occupation régulière, qui composent la bourgade aux consonances berbères de Tizaghen, dépendant de la commune de Béni Ouarsous, dans la daïra de Remchi (wilaya de Tlemcen). Ces citoyens, le visage émacié et ténébreux et les mains rugueuses, témoignent, pathétiques mais avec pudeur : « nous habitons dans une région déshéritée, sans le strict minimum des conditions d'une vie décente. Une existence des plus incertaines dans un pays où l'on parle de développement dans des discours inintelligibles pour nous parce que ne collant pas à nos réalités. Nous sommes les damnés de la terre ! » Ces humbles, qui ont dû presque s'excuser pour venir faire cet appel - comme s'ils éprouvaient une quelconque honte à parler de soi et de leurs conditions de vie -, énumèrent tous les aléas et les vicissitudes qui les enfoncent davantage dans leur dénuement. « La route, sinueuse et rocailleuse, qui mène au chef-lieu de la commune, est fortement accidentée d'où les drames de différentes natures. Nos ruelles sont un véritable parcours périlleux ; quant aux semblants de trottoirs, ils sont envahis à longueur d'année de mauvaises herbes. Même le cimetière est plein et on aura du mal à trouver une place digne pour enterrer nos morts. La seule ligne téléphonique se trouve au siège de la commune. En cas de tragédie, on n'aura que nos prières. » Cette bourgade, malgré les dénégations de certains responsables, n'a pratiquement jamais bénéficié d'un quelconque projet de développement. Les reliques sont celles de la colonisation. Et l'on se demande si cette agglomération existe vraiment sur le territoire d'une wilaya riche. « Nous lançons un appel au wali de Tlemcen pour venir constater de visu nos conditions de vie ; il rencontrera des Algériens sur le papier, dans le sang et dans le cœur, mais aussi des infra-humains, des ombres dans un village fantôme... »