L'Egypte attendait lundi les résultats officiels du premier tour de la présidentielle, qui doit, selon des chiffres préliminaires, se traduire par une finale tendue entre un dirigeant des Frères musulmans et un candidat issu du régime déchu de Hosni Moubarak. La commission électorale devait tenir une conférence de presse dans l'après-midi pour annoncer les résultats de ce vote qui s'est déroulé les 23 et 24 mai, après avoir examiné des recours déposés par plusieurs candidats a priori éliminés, ont indiqué les services du gouvernement. Les chiffres préliminaires diffusés depuis plusieurs jours par les Frères musulmans et la presse donnent le candidat de la confrérie, Mohammed Morsi, evançant, avec environ 25% des voix, d'une courte tête le dernier Premier ministre de M. Moubarak, Ahmad Chafiq (24%). Le second tour de cette présidentielle historique, qui se déroule dans un climat de compétition et d'ouverture politique sans précédent, est prévu les 16 et 17 juin. Trois candidats, le nationaliste arabe Hamdeen Sabbahi -crédité de 21% selon les chiffres officieux-, l'islamiste modéré Abdel Moneim Aboul Foutouh (17%) et l'ancien chef de la Ligue arabe Amr Moussa (11%) ont déposé des recours en invoquant des irrégularités. Le secrétaire général de la commission électorale, Hatem Bagato a estimé dimanche soir que ces recours pourraient modifier les résultats préliminaires. Les "résultats annoncés jusqu'à présent ne sont que des indications, la Commission est en train d'examiner les recours, et ces recours pourraient changer certains résultats", a indiqué M. Bagato à la télévision privée al-Nahar. L'ancien président américain Jimmy Carter, à la tête du Centre qui porte son nom et qui se donne pour mission d'observer le déroulement d'élections dans le monde, avait fait état samedi d'irrégularités "fortuites", assurant qu'"il n'y a pas eu de signe (...) montrant que la procédure ait favorisé un candidat en particulier". M. Carter avait estimé que le processus était encourageant", mais a aussi fait état de "contraintes (...) jamais imposées auparavant" aux observateurs de son organisation, notamment le fait qu'il n'avaient pas été autorisés à observer le dépouillement dans les centres régionaux. La perspective d'un second tour entre MM. Morsi et Chafiq, deux hommes aux parcours personnels et aux options politiques diamétralement opposées, fait redouter une fin de campagne très conflictuelle. La bourse du Caire a chuté de 3,5% dimanche en raison des tensions et des incertitudes politiques. M. Morsi bénéficie du soutien du puissant réseau militant de la confrérie, qui vaut aux Frères musulmans de détenir déjà près de la moitié des sièges de députés. Le plus important parti fondamentaliste salafiste, al-Nour (la Lumière), lui a officiellement apporté son soutien lundi, après savoir soutenu M. Aboul Foutouh au premier. M. Chafiq, ancien chef d'état-major de l'armée de l'air, est accusé par ses adversaires d'être l'homme des militaires qui dirigent le pays depuis la chute de M. Moubarak en février 2011. Il a fait campagne sur le thème du retour à la stabilité, cher à de nombreux Egyptiens après 15 mois d'une transition tumultueuse. Les deux candidats ont multiplié ces derniers jours les promesses de préserver les acquis de la "révolution" qui a renversé M. Moubarak et assuré qu'ils gouverneraient au nom de tous les Egyptiens, dans l'espoir d'élargir leur base électorale, notamment auprès des jeunes. Le Conseil suprême des forces armées (CSFA) du maréchal Hussein Tantaoui a promis de rendre le pouvoir aux civils avant la fin juin, une fois le nouveau président élu. Les pouvoirs du prochain président, qui sera élu pour quatre ans à la tête du plus peuplé des pays arabes (82 millions d'habitants), sont toutefois encore très imprécis. Le pays ne dispose pas encore d'une nouvelle Constitution pour remplacer celle en vigueur sous M. Moubarak, suspendue après sa démission.