Deux personnes ont été tuées mercredi à Tripoli dans le nord du Liban dans de nouveaux combats confessionnels liés au conflit syrien, portant le bilan à huit morts et 75 blessés en trois jours de heurts, selon des sources sécuritaire et hospitalières. Des accrochages à l'arme automatique et au lance-roquettes entre des bandes issues de deux quartiers misérables sunnite (anti-régime syrien) et alaouite (pro-régime), séparés par une rue, se poursuivaient de manière sporadique dans l'après-midi, selon une source sécuritaire. Durant la matinée, deux personnes ont été tuées et 15 blessées, dont cinq soldats, dans les affrontements entre les secteurs de Bab el-Tebbaneh, majoritairement sunnite, et Jabal Mohsen, quartier alaouite, la confession du président syrien Bachar al-Assad, selon des sources hospitalières. La veille, quatre habitants du quartier de Bab el-Tebbaneh, dont un garçon de 13 ans, et deux habitants de Jabal Mohsen, avaient trouvé la mort. Soixante autres avaient été blessées -50 combattants et civils, dont un enfant de six ans paralysé par une balle, et 10 soldats-, selon les mêmes sources. A une plus petite échelle, les deux communautés reproduisent en quelque sorte le conflit qui se déroule en Syrie voisine entre des sunnites, majoritaires, et des alaouites (branche du chiisme) minoritaires. Les deux camps se sont accusés mutuellement de chercher l'affrontement, malgré le déploiement de l'armée libanaise, censée séparer les protagonistes. "Nous ne voulons nous battre contre personne dans cette ville, mais le Parti arabe démocratique est loyal au régime syrien. Il fait tout ce que le régime lui dit de faire", dit Abou Mahmoud, 45 ans, un combattant sunnite de Bab el-Tebbaneh. Pour un autre combattant sunnite, qui ne veut pas donner son nom, "les gens d'en face agissent pour couvrir leur crime en Syrie et pour se venger de l'arrestation de Michel Samaha", un ancien ministre libanais proche de Damas et accusé d'avoir fait entrer des explosifs au Liban pour commettre des attentats. Sur l'autre colline, un responsable alaouite, Ali Fidda, déclare: "nous ne cherchons pas à imposer nos idées à quiconque, nous sommes cependant prêts à nous défendre si nous y sommes contraints". Un chauffeur de taxi, Abou Khodr Charbini, 40 ans, raconte avoir dû fuir son quartier de Bab el-Tebbaneh en raison des violences. "Je voudrais partir définitivement mais nous n'avons pas d'argent pour déménager", dit-il. Le Premier ministre libanais Najib Mikati a appelé l'armée et les forces de sécurité "à faire leur possible pour arrêter cette bataille absurde". "Nous avons à plusieurs reprises averti qu'il ne fallait pas se laisser entraîner" dans la crise en Syrie "mais il est clair que de nombreuses parties veulent précipiter le Liban dans ce conflit", a dit M. Mikati, originaire de Tripoli. Les combats, qui secouent régulièrement la ville portuaire entre pro et anti-Assad depuis le début de la crise en Syrie il y a 17 mois, avaient éclaté lundi par des échanges de tirs entre les deux quartiers. "L'armée pourchasse les hommes armés et a saisi une quantité de fusils, de bombes et de munitions", a-t-elle précisé mardi. Des incendies se sont déclarés dans plusieurs maisons et des voitures ont été endommagées. De nombreux immeubles ont été totalement abandonnés par les civils.