Après un an de discussions infructueuses, le chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) Yukiya Amano a appelé lundi l'Iran à faire un geste concret en ouvrant rapidement à ses experts le site militaire de Parchin. "Je demande de nouveau à l'Iran de fournir sans autre délai un accès au site de Parchin, qu'un accord soit trouvé ou non sur une approche structurée", a déclaré le Japonais selon le texte de son discours au conseil des gouverneurs, réuni à huis clos à Vienne. L'AIEA soupçonne l'Iran d'avoir procédé à Parchin à des tests d'explosion conventionnelle applicables au nucléaire, ce que l'Iran dément. Elle l'a accusé, images satellite à l'appui, de faire disparaître toute trace compromettante sur place. Accorder l'accès à Parchin serait une décision propre à "créer de la confiance", a jugé M. Amano lors d'une conférence de presse plus tard dans la journée, rappelant que les inspecteurs avaient déjà pu visiter un bâtiment de cette base située près de Téhéran en 2005. "A l'époque, il n'y a pas eu (besoin) d'un document, alors pourquoi l'Iran ne peut-il pas faire la même chose cette fois et nous accorder l'accès" au site?, s'est-il interrogé. Jusqu'ici, l'accès à Parchin était inclus dans les discussions sur un accord d'"approche structurée" visant à donner aux inspecteurs de l'AIEA un accès plus large à des sites, documents ou individus pouvant l'aider à déterminer la nature du programme nucléaire iranien. Dans un rapport en novembre 2011, l'agence avait dressé une liste d'éléments, présentés comme crédibles, indiquant que l'Iran avait travaillé à la mise au point de l'arme atomique avant 2003 et peut-être ensuite, ce que ce pays dément. Les deux parties avaient entamé dans la foulée des discussions afin d'établir un plan de vérification par l'AIEA des points soulevés par le rapport. Malgré plusieurs réunions depuis un an, la dernière ayant eu lieu à la mi-février, aucun progrès n'a pu être réalisé. De quoi inciter l'AIEA, comme le laissent entendre les propos de M. Amano, à repenser sa stratégie. "Je voudrais clarifier le fait qu'un document sur une approche structurée n'est pas une fin en soi", a-t-il dit dans son discours. "Nous ne devons pas perdre de vue l'objectif qui consiste à régler toutes les questions en suspens concernant le programme nucléaire iranien." "Le dialogue doit donner des résultats", a-t-il martelé. "J'aimerais être en mesure de faire état de réels progrès à la prochaine réunion du conseil en juin". L'appel de M. Amano fait écho à celui lancé par les grandes puissances à l'Iran la semaine dernière, au cours d'une rencontre à Almaty, au Kazakhstan. Le groupe des 5+1 (Etats-Unis, Chine, Russie, Grande-Bretagne, France et Allemagne) a proposé d'atténuer certaines sanctions, qui étranglent l'économie iranienne, en échange de concessions de Téhéran. L'Iran a qualifié la rencontre de tournant, les grandes puissances ont surtout choisi de souligner son caractère "utile", dans l'attente d'une nouvelle rencontre début avril pendant laquelle elles espèrent un geste concret de Téhéran. "Les négociations ne se poursuivront pas simplement pour le (seul) fait de négocier (...) Il n'y a pas un laps de temps infini", a déclaré à cet égard le secrétaire d'Etat américain John Kerry lundi à Ryad. Comme la réunion d'Almaty a permis d'apaiser quelque peu l'atmosphère régnant dans les relations entre l'Iran et la communauté internationale, le conseil de l'AIEA ne devrait pas au cours de sa réunion se montrer trop sévère envers ce pays, en l'épinglant dans une résolution, par exemple, selon des diplomates à Vienne. Le conseil devrait aussi décider de l'éventuelle réélection de Yukiya Amano, 65 ans. Le débat ce sujet est prévu pour jeudi, selon des sources diplomatiques. Il est l'unique candidat à sa succession. Souvent accusé d'être trop proche des occidentaux et particulièrement des Etats-Unis, il a beaucoup gagné en respect et en soutien au fil des années, y compris parmi les pays non alignés.