Une crise diplomatique a éclaté au grand jour samedi entre la Turquie et l'Egypte qui a expulsé l'ambassadeur turc au Caire pour "ingérence inacceptable" d'Ankara dans ses affaires internes, une décision suivie d'une mesure de "réciprocité" prise par Ankara.Suite à l'expulsion par le Caire de l'ambassadeur de Turquie, Ankara a déclaré juste après ce geste "persona non grata" l'ambassadeur d'Egypte dans le pays."L'ambassadeur d'Egypte Abderahman Salah ElDin (...) est déclaré +persona non grata+, conformément au principe de réciprocité qui est le fondement des relations internationales", a déclaré le ministère des Affaires étrangères turc dans un communiqué après avoir convoqué le chargé d'affaires égyptien en poste à Ankara.Le ministère a également annoncé avoir réduit les relations bilatérales avec Le Caire au niveau des chargés d'affaires.La Turquie avait promis auparavant de prendre des mesures de "réciprocité" en réponse à l'expulsion par l'Egypte de l'ambassadeur turc au Caire, Huseyin Avni Botsali. "Nous allons prendre des mesures de réciprocité après des consultations avec l'ambassadeur turc" expulsé, avait déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Levent Gumrukcu.L'Egypte a expliqué que l'ambassadeur de Turquie au Caire a été expulsé en signe de protestation contre l'"ingérence" d'Ankara dans ses affaires internes.L'ambassadeur égyptien, rappelé le 15 août au Caire, ne retournera pas à Ankara et le niveau de la représentation diplomatique égyptienne en Turquie sera abaissé, avec désormais seulement un chargé d'affaires, selon le ministère égyptien des Affaires étrangères.Ces décisions ont été prises en raison des déclarations du Premier ministre turc Recep Tayip Erdogan qui "constituent une ingérence inacceptable dans les affaires internes de l'Egypte et sont une provocation", a expliqué Badr Abdelaty, porte-parole du ministère. Une mesure diplomatique drastique prise par l'Egypte L'expulsion de l'ambassadeur turc est la mesure diplomatique la plus drastique prise par l'Egypte face aux critiques qui se sont élevées à l'étranger contre la répression des manifestations des partisans du président destitué Mohamed Morsi issu des Frères musulmans, menée par les autorités installées par l'armée. Celle-ci a fait plus d'un millier de morts, en majorité des manifestants pro-Morsi, et conduit à plusieurs milliers d'arrestations.La Turquie s'est montrée critique après la destitution par l'armée égyptienne en juillet dernier de Mohamed Morsi, qu'elle juge victime d'"un coup d'Etat inacceptable". La confrérie égyptienne entretient des liens étroits avec le parti pour la justice et le développement (AKP) au pouvoir en Turquie.Le Premier ministre turc Recep Tayip Erdogan, issu du courant islamiste, avait qualifié la destitution de Morsi le 3 juillet par l'armée de "coup d'Etat". Depuis la dispersion le 14 août dans un bain de sang de manifestants pro-Morsi, il a multiplié les condamnations, évoquant un "très grave massacre" de manifestants "pacifiques".Jeudi, il avait affirmé n'avoir "aucun respect pour ceux qui ont amené M. Morsi devant la justice", faisant référence au procès ouvert le 4 novembre du seul président jamais élu démocratiquement d'Egypte pour "incitation au meurtre" de manifestants.Le Caire a de son côté accusé la Turquie de "soutenir (...) des organisations cherchant à créer l'instabilité", et reproché à Ankara de chercher "à dresser la communauté internationale contre les intérêts de l'Egypte".Depuis la Turquie, le président turc Abdullah Gül a semblé vouloir apaiser les esprits, estimant que la situation était "temporaire et conjoncturelle" et disant espérer que "les relations reprendront leur cours".L'ambassadeur de Turquie au Caire a quant à lui affirmé à un média turc qu'il "(continuerait) à prier pour le bien de l'Egypte" car "il est de la plus grande importance pour la région et pour le monde que l'Egypte reste sur la voie de la démocratie".Au lendemain de la mort, officiellement, de plus de 600 personnes lors de la dispersion de rassemblements pro-Morsi au Caire le 14 août, Ankara et Le Caire annonçaient le rappel de leurs ambassadeurs pour consultations. Le diplomate turc est revenu au Caire début septembre mais son homologue n'est jamais retourné à Ankara. Les deux capitales avaient également annulé des manœuvres navales communes en octobre.D'autre part, des sources judiciaires égyptiennes ont annoncé samedi la prolongation de la détention préventive d'un étudiant turc accusé d'avoir participé à des "manifestations violentes" au Caire.