ISTANBUL - Il n'y aura pas de réconciliation avec Israël tant que ce pays n'acceptera pas une enquête internationale sur son raid contre la flottille pour Ghaza, a prévenu lundi la Turquie qui espère engranger le maximum de soutiens à sa cause lors d'un sommet régional à Istanbul. Si Israël donne son accord pour une telle commission d'enquête indépendante sous l'égide de l'ONU, "les relations (bilatérales) vont naturellement prendre une autre direction", a déclaré le ministre turc des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu. Mais, a-t-il souligné, "s'ils continuent d'échapper à cela, il ne saurait être question d'une normalisation des relations turco-israéliennes". Le raid en pleine mer le 31 mai de commandos israéliens sur une flottille transportant de l'aide pour Ghaza et des centaines de militants pro-palestiniens, au cours duquel neuf Turcs ont été tués, a suscité un tollé international et tendu à l'extrême les relations israélo-turques. Le gouvernement turc a rappelé son ambassadeur à Tel Aviv, annulé des exercices militaires conjoints et énergiquement condamné Israël. M. Davutoglu s'exprimait lors d'une conférence de presse avec ses homologues afghan et pakistanais en marge d'une réunion sur la sécurité régionale lundi et mardi à Istanbul. Les présidents iranien, syrien, palestinien et afghan, ainsi que le Premier ministre russe Vladimir Poutine, doivent participer aux débats. "S'ils n'acceptent pas cette commission, cela voudra dire qu'ils ont certaines réalités à cacher", a estimé le chef de la diplomatie turque. Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a indiqué dimanche qu'il s'était entretenu la veille par téléphone avec le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon de la constitution d'une commission d'enquête. "Le travail de cette commission sera très, très important pour nous", a-t-il déclaré. Mais Israël a exclu une telle commission. "Nous rejetons l'idée d'une enquête internationale", a déclaré dimanche l'ambassadeur israélien aux Etats-Unis Michael Oren, tout en précisant que son pays discutait avec l'administration Obama de "la manière dont sera mise en place une enquête interne". "Si ces convois n'ont pas réussi à faire lever le blocus (de Ghaza), alors les efforts doivent sans aucun doute être intensifiés (...) Toutes les méthodes doivent être utilisées", a pour sa part déclaré lundi à une télévision turque le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas. "La meilleure manière de répondre" au raid "est pour les groupes palestiniens de se réconcilier et de résister à Israël, main dans main", a-t-il ajouté, précisant qu'il envoyait une délégation à Ghaza pour tenter une réconciliation avec le Hamas. Le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU a adopté le 2 juin une résolution approuvant la mise en place d'une "mission d'enquête internationale" sur le raid israélien. Au sommet d'Istanbul, Ankara s'efforce de rallier le plus de participants possibles à sa cause. Une condamnation d'Israël pour le raid sera incluse dans la déclaration finale du sommet, a affirmé un diplomate turc sous le couvert de l'anonymat. Deux des pays représentés à Istanbul ont répondu à l'appel en fin de matinée. Le ministre pakistanais des Affaires étrangères a ainsi fait part du "soutien entier" de son pays à la Turquie sur cette question. "Le peuple du Pakistan est avec vous, le gouvernement du Pakistan est avec vous", a dit Shah Mahmood Qureshi en dénonçant l'"agression" israélienne. Zalmai Rassoul, chef de la diplomatie afghane, a lui aussi souligné que la Turquie pouvait compter sur le soutien total de son pays dans ce dossier.