Tout comme dans le reste du pays, la violence scolaire a atteint, à Oran, un seuil inquiétant. Entre janvier et février, de nombreuses voies de fait ont été signalées dans différents établissements scolaires, donnant naissance à une véritable levée de boucliers de la part des enseignants, des élèves et même des associations locales de parents d'élèves. Deux exemples récents qui ont suscité la colère de tout ce monde : au lycée El Hayat, des adolescents ont cru malin de bombarder leur enseignante de pétards. Cette dernière, touchée dans son amour-propre, s'est élevée contre ces actes. Mal lui en prit, car elle fut prise à partie par ses élèves. Cet acte a jeté le malaise dans le milieu de l'éducation et mis dans une sainte colère le reste des enseignants qui ont boycotté les cours en signe de protestation contre ces actes. Dans un autre CEM d'un quartier populaire, une autre enseignante a été agressée par son élève parce qu'elle lui avait interdit de manger en plein cours. De tels actes deviennent de plus en plus courants dans les écoles, CEM et autres lycées de la deuxième ville du pays. Il y a quatre ans, cette violence avait atteint une triste apogée en étant à l'origine de la mort par armes blanches de deux ados devant le lycée des Amandiers, à la sortie ouest de la ville. Entre ces provocations d'enseignantes et ces deux crimes, il existe toute une panoplie d'actes qui ont été relevés à Oran, suscitant la crainte du corps enseignant et l'indignation dans toute la société oranaise. L'élève est tantôt victime, tantôt auteur de faits de violence et l'adulte peut, lui aussi, se retrouver dans la situation de victime : des disputes des élèves entre eux, aux affrontements entre élèves et enseignants ou encore entre élèves et personnel administratif, personne n'y échappe. LES ECOLES D'ORAN DE PLUS EN PLUS DANGEREUSES Selon M. Rouani, un syndicaliste, qui a participé à la conférence sur la violence dans les écoles, organisée par le ministère de l'Education, il y a deux ans, 3.500 actes de violence entre élèves ont été recensés, entre 2010 et 2011, dans les écoles primaires ; plus de 13.000 dans le moyen et plus de 3.000 dans le secondaire. A l'échelle nationale, et selon Mme Remki, directrice centrale au ministère de l'Education qui s'est basée sur une étude de l'évolution de la situation de la violence et de la consommation de la drogue en milieu scolaire portant sur la même période (2010 à 2011), plus de 40.000 cas de violence entre élèves, plus de 6.000 cas de violence à l'égard du personnel enseignant et administratif, plus de 4.000 autres cas du personnel enseignant et administratif contre des élèves et 745 actes de violence entre personnels enseignant et administratif, ont été enregistrés. Pour ce qui est de la consommation d'alcool et de drogue en milieu scolaire, la même responsable a signalé 132 cas. Oran est classée parmi les zones les plus dangereuses pour les écoliers tant l'ampleur de la violence a atteint la majorité des établissements scolaires de la wilaya. Il y a une année, pourtant, les responsables de l'éducation de la ville avaient annoncé le recrutement de plus de 1.200 adjoints d'éducation pour contrecarrer ces problèmes. Mais jusqu'à présent, rien n'est visible sur le terrain ni même devant les établissements scolaires où les filles continuent de subir les violences de la part de voyous ou simplement, de leurs camarades. Et concernant l'absence d'éducateurs ou de vigiles, les enseignants avouent ne pas pouvoir gérer les situations de violence, car cela peut se retourner contre eux. L'absence des services de sécurité devant les établissements scolaires jugés sensibles, complique davantage la situation. C'EST « L'ECOLE QUI EST VICTIME DE VIOLENCE », SELON LE MINISTÈRE Selon le ministère de tutelle, qui organise des rencontres périodiques sur ce phénomène, « la violence scolaire n'est pas le produit de l'école. C'est l'école qui est victime de cette violence ». Mais si spécialistes, experts, enseignants et parents d'élèves s'accordent à dire qu'il est temps de protéger l'école, il reste que c'est la méthode qui manque le plus. Cependant, il faut reconnaître que souvent cette violence est d'ordre familial (conflits conjugaux, divorces des parents...) ou d'ordre psychologique (échec scolaire, manque de loisirs et d'espaces culturels...), il est peut-être rentable de voir de ce côté-là pour trouver des solutions. Il faut, surtout, imaginer des motivations pour le corps enseignant qui s'est vu contraint d'observer un certain désengagement et, parfois, une démobilisation totale vis-à-vis des problèmes sus cités.