Photos: Slimene S A. Le phénomène des chiens errants se répand de plus en plus en Algérie. Seuls ou en meutes, ces animaux investissent les quartiers et les cités, surtout à la tombée de la nuit. Durant la journée, ils ratissent les terrains vagues. Parfois ces canidés sont porteurs de rage, ce qui les rend beaucoup plus dangereux. Face à l'extension de ce phénomène notamment dans les banlieues, une seule parade : la fourrière canine. Dépendant de l'entreprise d'hygiène Hurbal, la fourrière canine de Boumati (El Harrach) s'occupe des animaux errants des 57 communes de la wilaya d'Alger. Elle emploie 60 agents et possède 13 véhicules. 24H sur 24, elle recueille en moyenne 50 chiens et 100 chats, tous trouvés sur la voie publique.«Nos équipes travaillent en patrouille. Pour le premier semestre 2009, nos services ont enregistré 80 plaintes relatives à une présence animale errante ou agressive», explique Mme Messaouda Saïdi, vétérinaire et chef de service de la fourrière canine d'El Harrach.Ces animaux errants sont mis dans des cages. Deux à trois chiens par cellule. Toutefois, les chiens ou chats dotés d'un collier occupent chacun une cage en attendant que leur propriétaire se manifeste. Premier constat à l'entrée de la salle : la propreté. Les conditions d'hygiène sont irréprochables. Seul inconvénient, une odeur nauséabonde se dégage des lieux. C'est le rayon des chiens errants. Les cellules qui abritent les animaux sont faites de ciment et de fer plein. Ce «confort» spartiate se justifie par le fait que ces animaux seront euthanasiés par électrocution à haute tension. Le procédé parait inhumain ? «Auparavant, nous leur administrions des injections mortelles mais on s'est aperçu que durant la première phase d'endormissement, ils souffraient», affirme Mme Saïdi. Dans la salle qui leur est réservée, les aboiements ne cessent jamais. Privés de liberté, ils s'excitent à la moindre apparition. Mais il y a autre chose qui se dégage de leur regard de «chiens battus» et triste. Quelque chose d'imperceptible, de sombre qui fait dire aux humains que ces animaux savent qu'ils vont mourir. Comme s'ils voulaient transmettre un appel au secours. Ils sont là à attendre un sauveur qui parfois ne vient jamais. N'empêche, à la vue de l'agent chargé de les nourrir, ils s'agitent encore plus. Ils guettent le morceau de viande que celui-ci leur lance. Les chats sont, pour leur part, plus calmes. Ils se mêlent pour se sentir en sécurité. Mais pour la responsable de la fourrière, s'apitoyer sur leur sort n'est pas une solution. «Je préfère les euthanasier que d'entendre dire qu'une fillette est morte après avoir été attaquée par un chien errant», précise Mme Saïdi. UN MATÉRIEL MODERNE MAIS INUTILISÉ Mais comment les équipes de la fourrière canine procèdent-elles pour capturer les animaux? «Nos équipes sont dotées d'une carabine anesthésiante, d'un filet lance-main, d'un paralyseur ainsi que de filets à deux barres de fer. Seul inconvénient, cet équipement ne peut être employé n'importe comment. «C'est un matériel de qualité qui ne peut être utilisé sur la voie publique par mesure de sécurité pour les citoyens. Il faut de grands espaces tels que les casernes, les réserves ou les aéroports pour intervenir», explique le chef de service. Pour attraper les animaux errants, les équipes utilisent cependant le fouet lasso et des pinces pour ceux d'entre eux qui sont les plus agressifs. Ce dernier matériel est décrié en ce qu'il inflige des traumatismes parfois irréversibles à l'animal. Les animaux sont mis ensuite en observation pendant 15 jours dans le but de détecter un éventuel cas de rage. Si le test est positif, l'animal est tout de suite euthanasié puis enfoui sous terre. Quand le cas est suspecté, il sera envoyé à l'Institut Pasteur. Pour les animaux qui portent un collier ou un matricule d'identification, leur mise à mort est différée de 72 heures. «Le délais est parfois prolongé pour donner le temps aux propriétaires de venir récupérer leur animal domestique», indique Mme Saidi. Et de poursuivre que si l'animal meurt, un vétérinaire établit un constat. A la fourrière canine, tout animal mordeur, griffeur ou contaminant doit être soumis à une surveillance durant une période de 15 jours francs, à partir du jour de sa capture. Cette surveillance comporte l'obligation pour le propriétaire de soumettre l'animal, vacciné ou non, à trois visites effectuées par un vétérinaire inspecteur local ou un vétérinaire investi du mandat sanitaire. La première visite est effectuée dans les 24 heures qui suivent la capture, la seconde au plus tard le 7e jour et la troisième le 15e jour. C'est une notification pour détecter les cas de rage. En effet, à titre indicatif, la lutte contre la rage est régie par le décret du 16 octobre 1984 qui fixe la nomenclature des maladies réputées contagieuses et édicte les mesures sanitaires générales communes à ces maladies.