Une vingtaine de personnes ambitionnent de diriger le pays, dont Amr Moussa, l'ancien patron de la Ligue arabe, Omar Souleïmane, l'ancien chef du renseignement, et Ahmad Chafiq, ex-chef de gouvernement. Les Frères musulmans, qui s'étaient engagés à ne pas y participer, ont créé la surprise en présentant leur numéro deux et richissime homme d'affaires Khairat al-Chater. Les islamistes, qui redoutent une « décision » du Conseil qui changerait le rapport de forces, jusque-là en leur faveur, étalent leur « plan B ». Ils iront à ce scrutin forts de la « feuille de route » qu'ils ont reçue mardi dernier des responsables du Conseil de sécurité nationale (NSC), le cabinet de politique étrangère du président Barack Obama, avec cinq candidats : Khairat al Chater, qui pourrait être disqualifié à tout moment par la commission, -sa mère a acquis la nationalité américaine en 2006 et il n'est sorti de prison qu'en mars 2011 après avoir été condamné par un tribunal militaire à sept ans de réclusion pour des accusations de terrorisme et de blanchiment d'argent-, Mohammed Morsi, le président du Parti de la liberté et de la justice comme une « alternative », le prédicateur salafiste, Hazem Salh Abou Ismail, Abdelmounem Abou al Foutouh, un dissident de la confrérie, et le prédicateur Safwat Hegazy de la Gamaâ islamiya, le groupe islamiste ultra conservateur qui fut, avec le Jihad islamique, à l'origine d'une vague d'attaques ayant causé la mort de centaines de personnes dans les années 1990. Tous se sont fixé comme premier et dernier objectif : l'application de la « chariaâ ». « Nous veillons à la réussite de la révolution (...). C'est pourquoi nous avons décidé, confrérie et parti ensemble, de présenter Mohammed Morsi, en tant que candidat alternatif à Khairat al Chater », indique la confrérie. C'est « une mesure de précaution », précisent les Frères estimant que « celui qui observe le paysage politique voit de nombreux changements rapides, ce qui montre qu'il y a des tentatives de créer des obstacles pour empêcher certains candidats de compléter leur chemin ». Les islamistes, qui ont découvert la place Tahrir au Caire, battront-ils le pavé avant le scrutin ? Amr Moussa, Omar Souleïmane et Ahmad Chafiq tenteront, en tant que candidats indépendants, de rebattre les cartes de ce scrutin. Vœu pieux. Tous les analystes s'accordent à dire deux choses. Primo, l'actuelle période de transition, avec l'élaboration de la constitution par les seuls religieux, est sans issue. Secundo, les candidatures des trois résidus de l'ancien système sont « senties » par la rue égyptienne comme « des parfums de contre-révolution ». Ayman Nour, l'opposant qui aurait pu incarner le changement, a été empêché de se présenter par la justice administrative au motif que toute personne ayant été condamnée à de la prison doit attendre six ans à partir de la fin de sa peine ou de la date de sa grâce avant de pouvoir retrouver ses droits politiques. Et pourtant, le pouvoir a décidé quelques jours auparavant de lui rendre ses droits politiques. A un mois et demi du premier tour, prévu les 23 et 24 mai, la situation est confuse en Egypte où les jeunes manifestent et leur refus des islamistes et de l'actuelle Assemblée constituante « pas réellement représentative de la société » à leurs yeux.