C'est le constat que font beaucoup d'observateurs et même les détenteurs de ces magasins spécialisés dans la vente des objets anciens. « Maintenant, la majorité des personnes qui viennent ici cherchent des objets souvent de grande valeur historique et marchande », a indiqué le propriétaire de la « Caverne d'Ali » de la rue Krim Belkacem, à Alger. Pour ce qui est de l'origine de ces meubles, un jeune apprenti indique que l'acquisition de ces produits « parvient par des familles qui veulent renouveler leur mobilier en optant pour des meubles modernes. Ils se trouvent donc dans l'obligation de se débarrasser des vieilleries ». Les revendeurs, quant à eux, prennent la peine de les entretenir de manière à ce que ces meubles ne perdent pas de leur valeur. Voilà, avec quelques opérations sommaires de réhabilitation ou de simple nettoyage, ces objets retrouvent assez vite une seconde jeunesse pourvu que la qualité de l'objet soit solide. Au niveau de « Z. F. Antiquités », dans la rue Didouche Mourad à Alger, la clientèle diffère. Les « merveilles » sont proposées à une clientèle « spéciale » composée principalement de riches passionnés d'anciens meubles et autres antiquités. Selon les propos des occupants des lieux, « ce genre de personnes sont rares, mais ils existent quand même ». A l'intérieur de ce trésor, l'on trouve des chefs-d'œuvre : toutes sortes de meubles, ceux faits en bois, en bois ciré, en bois peint, ou encore en bois vernis... L'on trouve aussi des produits réalisés avec du bronze, du cuivre doré. Des ferronneries et surtout des tableaux anciens font partie du lot des produits exposés. Une cliente salue le boutiquier et lui demande s'il y a du nouveau. Celui-ci lui montre quelques tableaux, « ils sont arrivés hier », lui dit-il. Elle a pris tout son temps pour contempler les choses exposées afin de satisfaire sa passion pour les objets décoratifs anciens. « Je prends ce vase. J'ai vu un exemplaire à Sidi Bel-Abbès, mais ce jour-là, je n'avais pas d'argent sur moi. » La dame décortique minutieusement le vase et repart avec sans payer le moindre sou. Elle compte revenir pour racheter d'autres choses et payer le tout à la fois, étant une cliente fidèle. A la « Caverne d'Ali Baba » de Oued Knis, à Ruisseau, l'atmosphère est autre. Là, on trouve toutes sortes d'objets et pour toutes les catégories d'acheteurs. Le brocanteur, Ammi Saïd, déplore la baisse du pouvoir d'achat du citoyen algérien qui n'a plus les moyens de s'offrir des objets anciens dont le coût, il est vrai, est souvent trop élevé pour sa modeste bourse. « C'est pour cela que nous n'acceptons pas d'acheter et réparer tous les objets proposés. Toutes ces choses que vous voyez trouveront acheteurs », a-t-il indiqué. Ammi Saïd regrette également la disparition de bon nombre de maîtres artisans et l'absence de formation dans la filière de l'artisanat traditionnel. Il déplore également le fait que d'autres « civilisations » aient pris le dessus avec l'importation de meubles et autres objets en provenance de l'Asie particulièrement. « Les plateaux en cuivre qui trônaient dans nos salons ont cédé la place à ceux en plastique », a-t-il regretté. Mais tout de même, son magasin ressemble à une braderie. Tous les jours, la caverne est noire de monde. CONTRIBUER À LA PRESERVATION DU PATRIMOINE Larbi, retraité de France, est un habitué des lieux, dit qu'il est collectionneur d'objets anciens. Il achète de grandes quantités de vieilleries. « J'ai réservé chez moi tout un hangar à ces merveilles que j'achète et répare moi-même parfois. » Pour lui, depuis plus de quinze ans, chaque pièce lui rappelle une histoire. En plus d'une occupation, le stock d'objets divers le rassure de laisser des choses belles et de grande valeur à ses enfants et petits-enfants. « C'est ma manière de rester toujours vivant pour les générations futures et au-dessus de tout, je suis heureux de contribuer à la préservation du patrimoine national », a-t-il conclu. Au niveau de Sidi Fredj, le magasin « Œuvres d'Art », situé à l'intérieur du complexe touristique, est bourré d'antiquités. L'entrée de l'échoppe est utilisée pour l'exposition de grandes jarres et de gigantesques portes chandelles de couleurs dorées. Le propriétaire des lieux travaille beaucoup plus durant les vacances d'été. A l'intérieur, l'on en trouve des objets utilitaires, d'ameublement et de décoration. Des merveilles en cachent d'autres. Ici, la vente d'objets d'art de grande valeur historique et artistique nécessite des moyens financiers conséquents et demande une capacité de négociation à toute épreuve pour pouvoir les acquérir à bon prix. « Je ne vends des œuvres d'arts qu'aux fins connaisseurs en la matière, car avant d'être commerçant je suis un amoureux des belle choses », a indiqué l'antiquaire. Outre les plateaux et les lustres anciens cédés entre 7 000 et 12 000 DA, le brocanteur vend également des salons de toutes origines. Le plus cher est sans conteste le salon complet style Louis XIV cédé à 130 000 DA. Le salon syrien est vendu entre 100 000 et 110 000 DA. Le commerçant ne fixe jamais ses prix, « c'est à la tête du client et selon ses exigences et l'intérêt qu'il porte à l'objet », a-t-il expliqué.