Elle est racontée par M. Aït Mehdi dit « Si Mokrane », un officier de l'ALN en Wilaya III appelé à rejoindre à partir de la base de l'est en Tunisie, le commandement de la Wilaya III. L'ALN, forte de près de 1300 hommes fit une démonstration de courage et d'abnégation. Devant l'inégalité des forces et l'incertitude de rejoindre leur zone, les moudjahidine durent se battre comme des lions. Nombreux sont ceux qui sont tombés au champ d'honneur. Les Français ont eux aussi eu des pertes énormes. La cause, l'expérience des hommes et des chefs de l'Armée nationale qui, malgré un terrain peu favorable, surent l'utiliser au mieux en recherchant d'abord la dispersion créant ainsi plusieurs points d'ancrage et obligeant l'ennemi à disloquer son commandement et ses liaisons. Pour l'ALN, les pertes s'expliquent tout autant par la violence des combats que la qualité des troupes ennemies, mais le gros de nos pertes est incontestablement dû aux frappes aériennes et à l'artillerie. Mais la tactique de l'ALN et la rage de réussir le passage ont permis aux moudjahidine de faire durer les combats pendant près de 8 jours, du 27 avril au 3 mai. A nos 1.300 djounoud, l'Armée française opposa 6 bataillons d'infanterie, 4 régiments paras, 1 groupement blindé et un appui feu aérien et d'artillerie. L'ALN s'est battu à 1 contre 12. Le franchissement de la ligne Morice se faisait un par un par nuit très noire. Un passage était creusé sous le premier réseau électrifié qu'il fallait emprunter en rampant et en s'aplatissant au maximum dans la flaque d'eau qui inondait les lieux. Les djounoud de l'ALN étaient déjà exposés à la mort, une mort atroce par électrocution en franchissant le réseau des barbelés. Lorsqu'un membre du groupe est pris « le corps est tiré pour libérer le passage », raconte Si Mokrane. A l'aide d'une canne tenue par l'éclaireur. Et des fois, ce n'est pas, malheureusement un corps seulement qui est ainsi retiré, selon lui. Et une fois le passage du premier réseau achevé, il y avait un second à franchir alors que les chars arrivaient balayant de leurs projecteurs la zone.La bataille de Souk Ahras, c'est l'histoire de ces périlleux combats contre l'ennemi, pour assurer coûte que coûte les liaisons et ravitaillement en armes des maquis, les difficiles et très risquées opérations de franchissement des frontières. Lors de la bataille de Souk Ahras, les corps à corps étaient fréquents, les assauts repoussés et renouvelés pour rompre des encerclements se sont succédé, marqués parfois par des ruses et des simulations efficaces. L'absence de prisonniers atteste de la détermination des djounoud de l'ALN et de leur foi dans la cause de l'indépendance. DES EPREUVES DURES POUR ASSURER LE FRANCHISSEMENT DES FRONTIÈRES Déjà le déplacement à travers la frontière est une très grande épreuve. M Aït Mehdi raconte : « Nous faisions de longues étapes, parfois presque au pas de gymnastique de façon à arriver en lieu sûr avant le lever du jour. Nous manquions de sommeil. Il m'est arrivé de dormir en marchant l'espace d'un moment sans pour autant perdre mes réflexes. C'est inimaginable. Nous avions parfois les pieds en sang car les jours de repos étaient inexistants et pour nous soulager, nous utilisions une plante appelée « Maghramane » dont nous mettions les feuilles sous la plante des pieds à l'intérieur des pataugas jusqu'à ce qu'elle perde ses effets. Cette plante cicatrisait la peau, la rendait un peu plus dure, réduisait la transpiration et soulageait la douleur (...). Certaines étapes étaient dures, car nous marchions à travers les maquis en dehors des sentiers pour éviter les endroits à risques, parfois accompagnés de gros orages où la nuit était tellement noire, le vent réellement fort qu'il fallait se coller les uns aux autres. Nous dormions parfois dehors, tantôt dans des refuges aménagés par des moudjahidine en zones interdites et aussi chez l'habitant. Même fatigués, la foi nous transformait au point où nos comportements d'endurance et de courage étaient invraisemblables. Quel potentiel de réserve chez l'être humain lorsque celui-ci est tenu par un idéal, par la foi ». Tiré d'un récit de M. Aït Mehdi, ancien officier de l'ALN