C'est un consommateur qui a déposé une requête demandant à Peugeot Algérie réparation pour préjudice moral et financier. « L'audience aura lieu le 12 juillet prochain au tribunal d'El Harrach », a annoncé, hier, à Alger, le président d'Apoce, Mustapha Zebdi, lors d'une conférence de presse au forum du quotidien El Moudjahid. C'est une première dans l'histoire de la concession d'automobiles. Une autre requête est inscrite au niveau de la justice et deux autres suivront contre le même concessionnaire. Mais Peugeot n'est pas le seul mis en cause. « D'autres concessionnaires automobiles sont quotidiennement dénoncés pour diverses atteintes aux droits des consommateurs », a signalé M. Zebdi. Et pour cause, l'Apoce reçoit, quotidiennement, 5 à 10 requêtes de consommateurs dénonçant des infractions au décret 07-390 relatif à la concession de véhicules neufs. « Pour ledit concessionnaire, les plaintes se comptent par dizaines », a-t-il noté. Ces infractions vont du retard sur le délai de livraison, des cas récurrents pour la majorité des concessionnaires activant sur le marché algérien, aux plus graves mettant en cause la sécurité du consommateur et les rallonges injustifiées sur le prix du véhicule. A ce propos, M. Zebdi cite le cas d'un client ayant acquis une Renault Clio pour laquelle il a rajouté un supplément de 180 000 DA sur le prix initial. A Constantine, ce sont 11 clients qui ont dû débourser chacun 250 000 DA de plus pour acquérir des véhicules chez un agent agréé d'un concessionnaire. C'est pourquoi, l'Apoce et la Fédération à laquelle cette dernière est affiliée demandent la révision du décret 07-930 de 2007. LES CONCESSIONNAIRES PROFITENT DES FAILLES DANS LA REGLEMENTATION Les concessionnaires profitent des failles dans le seul texte régissant cette activité, en l'absence de la mise en application de la loi sur la concurrence, pour imposer leur diktat, ont souligné les représentants des consommateurs. Ainsi, le délai de livraison imposé par la loi est de 45 jours à compter de l'établissement du bon de commande. « Mais, souvent, cette période s'étale sur plusieurs mois sans réparation du préjudice causé au client », a rapporté M. Zebdi. En effet, la loi autorise une prorogation de ce délai en commun accord entre les deux parties (concessionnaire et client) qui doit figurer sur le bon de commande. Mais là aussi, le concessionnaire se contente d'un accord verbal souvent imposé au client n'ayant pas le choix. Et pour raccourcir ce délai, le concessionnaire exige le paiement de la totalité du prix du véhicule alors que la loi fixe comme seuil plafond un acompte de 10% de ce prix, explique le président de l'Apoce. D'autres infractions font l'objet de plaintes contre Hyundai, Renault, Cima Motors pour ne citer que ceux-là sur la dizaine de concessionnaires mis en cause. Des plaintes qui portent sur le non-respect des caractéristiques techniques, objets de commande, la quantité de carburant permettant de rouler sur une distance de 50 kilomètres mais qui est de loin inférieure, sur le triangle de signalisation qui n'est pas délivré avec le véhicule, l'immatriculation provisoire non-conforme pour 48 heures, sur la non-mise à la disposition du client d'un véhicule en cas d'immobilisation de son véhicule pour une durée supérieure à 15 jours, la non-disponibilité de pièces de rechange, sur le tonnage inférieur à ce qui est mentionné sur le bon de commande et la fiche technique du véhicule, et enfin l'impossibilité de communiquer avec le personnel du « service clientèle » qui est aux abonnés absents. Mais le comble, ce sont les remises sélectives pour les clients possédant des licences d'ancien moudjahid à qui on impose d'autres véhicules et le refus d'accepter des licences dont la période d'expiration est proche alors que la validité est toujours de mise à la date indiquée sur le document. « Des démarches ont été effectuées auprès des concessionnaires », a fait savoir M. Hacen Menouar, chargé de communication de l'Apoce. Certaines ont abouti à la résolution à l'amiable du différend tandis que pour d'autres, les concessionnaires ont refusé de rencontrer le représentant de l'Association. M. Zebdi avance le taux de 80% de requêtes résolues à l'amiable. « L'ALGERIE EST LE SEUL PAYS OÙ LE VEHICULE D'OCCASION COÛTE TROP CHER » S'agissant du phénomène des revendeurs, l'Apoce a évoqué le cas d'une commande de 40 véhicules de la même marque par un même client. Des voitures qui se sont retrouvées en vente sur le marché informel. « L'Algérie est le seul pays où les véhicules sur le marché d'occasion coûte 120 000 DA de plus que chez le concessionnaire », note M. Menouar. L'Apoce réclame des autorités compétentes l'arrêt, voire le retrait provisoire, de 90 jours de l'agrément au concessionnaire « hors-la-loi » et le paiement d'une indemnité journalière au client dans le cas de non-respect du délai de livraison ainsi que la mise en place d'une commission de protection du consommateur au sein de l'APN. Pour l'expert en commerce extérieur, Abdelmalek M'barek Seraï, « les Algériens sont arnaqués sur le prix des véhicules ». Et pour cause, la réglementation internationale stipule que tout produit stocké perd une partie de sa valeur et « la majorité des produits versés sur le marché algérien provienne de stocks en Europe où une marchandise entreposée pendant six mois perd 50% de sa valeur ». Donc, « les Européens sont en train de nous voler et c'est une perte pour le Trésor et même les remises faites sont fictives puisque les concessionnaires pratiquent des prix de véhicules qui sont considérés comme sortant à peine de l'usine », observe-t-il En fait, avance-t-il, « les prix réels de ces véhicules varient entre 540 000 et 550 000 DA ».