Jean Asselmeyer, réalisateur de documentaires sur l'Algérie et militant anti-impérialiste, a voulu montrer dans ses films l'engagement de certaines personnes d'origine étrangère pour la lutte de libération de l'Algérie à travers des témoignages vivants qui devraient susciter les débats, à l'occasion du 50e anniversaire de l'Indépendance de l'Algérie. UN BREF APERÇU DE VOTRE PARCOURS MILITANT ? Je suis un militant anti-impérialiste. J'ai utilisé plusieurs moyens dans mon combat en étant d'abord éditeur à la fin des années 60 et début 70 en Allemagne en co-fondant une maison d'édition appelée encore Tiers Monde, qui a publié des ouvrages d'auteurs anti-impérialistes, soit par leur lutte, soit par leurs analyses économiques ou politiques. En particulier, « Le journal de Bolivie » de Che Guevara dans sa version allemande, des ouvrages d'économie de transition des pays, comme l'Algérie, qui avaient acquis leur indépendance par la lutte armée, ou encore l'auteur économiste égyptien Samir Amine. J'ai fait des contributions dans le Monde diplomatique. Au cinéma, j'ai réalisé mon premier film diffusé sur TF1 en tant que chaîne publique en France, en 1975, portant sur la fraction armée rouge appelée la bande à Bader, avec Pierre André Bouton, après une formation à la télévision où j'ai côtoyé Fassbinder et Schlöndorff. Puis j'ai réalisé des sujets pour le magazine culturel d'Arte « Metropolis » sur des auteurs, cinéastes et des hommes de théâtre engagés comme pour l'Algérie sur René Vautier et le plasticien Rachid Korichi, sur Bourdieu et l'Algérie, sur le Palestinien Mahmoud Derwich, le dramaturge anglais Harold Binter, grand militant contre l'impérialisme et le colonialisme, pro-palestinien. Il y a eu aussi de longs documentaires dont trois sur l'Algérie. JUSTEMENT, PARLEZ NOUS DE CES DOCUMENTAIRES SUR L'ALGERIE... J'ai réalisé « Alger regarde en face », en 2002-2003, qui a été diffusé par la télévision algérienne et co-produit aussi par Arte et TV5 Monde. Il s'agit d'un parcours culturel d'un architecte suisse dans Alger où il a vécu, Jean jacques Deluz, qui présente l'histoire architecturale d'Alger à travers différentes personnalités de la culture de ce pays comme Boudjema Karèche qui a fait connaître le cinéma algérien. Il y avait un musicien qui a été chef d'orchestre de l'Opéra d'Alger, Amine Kouider, le chanteur Djamel Allam, le poète Djamel Amrani et l'homme de théâtre, Benguettaf. Le deuxième documentaire, en 2007, « Ils ont choisi l'Algérie » qui part de la constatation d'Européens que d'aucuns appellent « Pieds- noirs », dont certains ont épousé la cause de l'Algérie indépendante et d'autres parce qu'ils y sont nés ou avaient des attaches avec ce pays. Ce film évoque l'action et l'exécution d'un militant communiste d'origine européenne, Henri Maillot, et a donné, entre autres, la parole à quelqu'un qui a survécu à l'affrontement. Dans ce film, il y avait aussi des personnages d'Alger et d'Oran comme Bonifacio qui a créé une association de Français d'Algérie. Dans ce film, il y a aussi un prêtre, le père Gonzalez, qui avait un engagement social en Algérie et était à l'époque directeur du Secours Catholique, Caritas. ET LE DERNIER FILM SUR L'ALGERIE... En mars 2012, le film documentaire « Ils ont rejoint le front » qui reprend en apparence la thématique de « Ils ont choisi l'Algérie », dans la mesure où ce sont des militants qui ont rejoint la lutte armée pour la libération de l'Algérie. Quatre personnages ont en commun leur origine européenne dont une femme, Alice Wener, dont la famille vivait depuis deux générations en Algérie, qui parle de son séjour dans cinq prisons françaises et de la peine de mort dont a été victime un militant français, Fernand Yveton, exécuté à la prison Barberousse (Serkadji), avec la caution de François Mitterrand en tant que ministre de la Justice. Il a été condamné à cette peine pour avoir déposé une bombe dans la centrale de gaz du Hamma. L'autre témoin est l'avocat d'Yveton, Me Smadja, qui avait assisté à son exécution. Cinquante ans après, il a encore les larmes aux yeux. Ensuite, les témoignages d'Annie Steiner, qui a choisi de se situer du côté des Algériens bien qu'elle appartenât à une classe aisée et privilégiée. Puis Femix Colosi, un ouvrier issu d'une famille pro-Algérie française et en raison de son engagement syndical s'est retrouvé dans le même groupe que Fernand Yveton. Ce syndicaliste raconte son parcours et son anti-colonialisme. Dans ce film, on y retrouve le témoignage de Pierre Chaulet, jeune étudiant en médecine qui a très tôt rejoint le FLN en Tunisie. Il raconte sa rencontre avec le dirigeant Abane Ramdane. Le quatrième personnage n'est pas né en Algérie mais avait rejoint la lutte du peuple algérien, Roberto Miniz, dit Mahmoud l'Argentin, ajusteur et mécanicien qui, par solidarité internationale, dans son Argentine natale, à l'âge de 38 ans, a décidé de rejoindre en 1955 une base secrète du MALG au Maroc.