Le public qui a assisté, jeudi dernier au soir, à la générale de la pièce « Zewadj ou Lawedj » de Souad Sebki et Yazid Sahraoui, a eu droit à une heure et demie de rire. Le jeu des deux comédiens ainsi que la thématique traitée étaient autant de signes annonciateurs d'une réussite certaine. La pièce, hilarante, traite avec humour et sarcasme des problèmes inhérents au mariage dans notre pays. « Zewadj ou Lawedj » s'ouvre avec un air de fête. Le couple, Mabrouk et Mabrouka, traverse la salle, à la surprise du public. Il ose même un pas de danse. Ils sont heureux de leur nouveau statut. Mais le bonheur est éphémère. La réalité les rattrape. Le couple qui loue une chambre d'hôtel pour y passer la nuit de noces, veut à tout prix fuir la poisse et les gens malintentionnés. La chambre est presque nue : une petite table sur laquelle trônent un panier de fruits, une bouteille d'eau, un jus et deux verres. Mabrouka rentre, la première. Mabrouk, lui, est retenu par une nuée d'invités. Il rejoint enfin sa femme. Elle est d'une timidité presque maladive et n'arrive pas à parler à son époux, timide lui aussi. Mais au prix de grands efforts, il réussit à lui faire arracher quelques phrases. La discussion commence avec, en filigrane, une véritable radioscopie des contraintes et des entraves auxquelles fait face la jeunesse. Avec finesse et humour, les deux comédiens évoquent crise de logements, chômage, promiscuité et poids des traditions. Situation matérielle oblige, le couple, au lieu de fêter comme il se doit sa première nuit, se retrouve, la mort dans l'âme, à se disputer et à s'accuser au risque de se séparer. Mais la goutte qui a fait déborder le vase, c'est lorsque la femme découvre que son époux est manchot. Le gant avec lequel le jeune homme cache son handicap tombe. Sa femme n'en revient pas. Elle n'arrive pas à comprendre pourquoi son mari lui a caché une telle chose. Le public comprendra lorsque celui-ci commence à en parler. Son handicap est à l'origine de ses échecs sentimentaux et ses projets de mariage. Mabrouk et Mabrouka, après maintes réflexions, décident de vivre ensemble et de fonder un foyer. La pièce de Souad Sebki est une réflexion, une critique et un cri contre une société qui a tendance à souvent faire de la femme un être mineur, un monde qui ne se soucie pas des malades et de ceux qui se situent au bas de l'échelle sociale. Ce n'est pas un hasard si la scène la plus marquante de la pièce est incontestablement celle où la comédienne pointe une société qui juge négativement la femme, qu'elle n'hésite pas à désigner à la vindicte à la première occasion, alors qu'elle s'arrange à ne rien dire qui fâche quand il est question de parler de l'homme, malade ou handicapé. Le public n'a pas arrêté de s'esclaffer, d'autant que la pièce, écrite en arabe populaire, n'a pas manqué d'humour, de gestuelle et de mimique propres aux deux comédiens.