La crise syrienne franchit les frontières. Début d'une régionalisation ? Moscou, qui a recensé, ces derniers jours, plusieurs incidents sécuritaires aux frontières entre la Syrie, d'un côté, le Liban et l'Irak, de l'autre, y croit. « Le conflit, qui était interne à la Syrie, commence à se propager à l'extérieur du pays. Il constitue, désormais, une menace pour la sécurité des Etats voisins », déclare Alexandre Loukachevitch, le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères. Preuve de cette « régionalisation », l'assassinat de 48 militaires syriens dans une embuscade tendue, lundi dernier dans la province d'Anbar, l'une des places fortes de « l'Etat islamique d'Irak », la branche irakienne d'Al-Qaïda, et dont les habitants entretiennent des liens tribaux avec les habitants de l'est de la Syrie. Par un « groupe terroriste », précise Baghdad prenant le soin de dénoncer cette attaque « contre la souveraineté de l'Irak, son territoire et sa dignité ». Cette embuscade, 24 heures après l'accusation de l'Irak d'ingérence par le Conseil national syrien, suscite moult interrogations. « Après avoir accordé au régime syrien un soutien sur les plans politique et du renseignement, l'ingérence du gouvernement irakien (...) dans les affaires syriennes a atteint un autre niveau », écrivait, dimanche dernier, dans un communiqué, la principale composante de l'opposition syrienne. Cette embuscade risque, selon les analystes, d'entraîner ce pays dans une guerre civile. Pour certains d'entre eux, il y est déjà avec la « confessionnalisation » de cette crise. Nouri al-Maliki, dont la démission de son poste de chef du gouvernement est réclamée par les sunnites depuis décembre dernier, promet de résister de toutes ses forces aux tentatives de propager la crise dans son pays. « D'où qu'elles viennent », précise Ali Moussaoui, son porte-parole. « Cela confirme, dit-il, nos craintes sur le fait que certains tentent de propager la crise syrienne en Irak ». Devenu depuis 2003, l'une des caisses de résonnance de l'antagonisme entre sunnites et chiites à l'échelle régionale, l'Irak court, tout comme la Syrie, un risque, celui d'un démembrement. La prochaine réunion en Europe entre Russes et Américains pour traiter de la crise syrienne réussira-t-elle à freiner cette « régionalisation » ?