La librairie Tiers-Monde a abrité, récemment, une vente dédicace de l'ouvrage « Lecture de l'espace oasien » signé par le sociologue Nadir Marouf. Cet essai, qui a été édité une toute première fois, en 1980, chez les éditions Sindbad, vient d'être réédité par la maison Barzakh. Explications. « Ce n'était pas un ouvrage de jeunesse quand il est sorti en 1980 puisque j'ai bouclé mes quarante ans à l'époque. C'était le résultat d'un travail de terrain que j'avais effectué d'ailleurs avec mes étudiants au cours des années 1970. C'était le résultat d'enquêtes sur le terrain sur la société que j'ai appelé l'espace oasien. Cette société-là repose sur un capital précieux qui n'est pas celui de la terre, mais de l'eau. C'est-à-dire que toute la propriété fonctionne sur l'eau ; même les dots dans les mariages sont négociées à partir des parts d'eau qui sont données par la famille du mari à celle de l'épouse. Nous sommes dans ce qu'on appelle une société hydraulique au sens où l'entendent les historiens marxisants, disons », a déclaré l'auteur. Il a été donc intéressé par cette question qui l'a amené à disséquer en profondeur la manière dans laquelle cette société est organisée à partir des contraintes hydrauliques. « On avait insisté sur le fait que l'Algérie est multiple, qu'on ne peut pas légiférer de manière univoque ou uniforme pour l'ensemble des écosystèmes qui constituent le pays. Et que lorsqu'on dit la terre pour celui qui la travaille, ça a un sens pour les gens du Nord, mais ça n'a aucun sens pour les gens du Sud, pour ne donner que cet exemple. Une invitation à une plus grande circonspection de la part des commis de l'Etat qui ont pour charge la gouvernance d'un territoire, pour se rapprocher davantage des réalités du pays, et de manière à ce que les actions qui sont menées soient adaptées au contexte », a-t-il expliqué. Avec cette réédition, l'auteur a voulu apporter quelques « aménagements » de circonstance. « Ce qu'il y a de nouveau, c'est un certain nombre d'aménagements, des correctifs qui ont été faits ou actualisés par rapport à ce qui a été dit, une préface qui re-contextualise le sujet par rapport à ce qui s'est produit depuis la mise en valeur des terres du Sud, les lois de l'époque Chadli. Ce livre a été écrit avant les grandes réformes », a-t-il indiqué. L'auteur regrette que cet ouvrage ne soit pas accompagné par un DVD, pour des raisons techniques apparemment difficiles de réalisation. « Mais on peut consulter ce DVD en ligne comme cela a été précisé dans la préface. Autrement dit, ce DVD indique les enquêtes que j'ai menées durant la décennie 2000-2010 ; j'ai fait des enquêtes récentes sur la situation en agriculture à la suite des grandes réformes qu'a connues le Sud à travers la mise en valeur des grandes fermes privées puis le forage de l'albienne qui pose un certain nombre de problèmes écologiques qui sont traités dans le documentaire » a-t-il laissé entendre. « Parole d'un préfacier » est le prochain ouvrage que Nadir Marouf compte publier. « Ce livre rassemble toutes les préfaces et tous les avant-propos que j'ai pu écrire en marge des ouvrages collectifs ou même individuels écrits par d'autres que j'ai préfacés. De même quelques hommages que j'ai pu rendre dans ma carrière », a-t-il révélé. Nadir Marouf est né en 1940 à Tlemcen, est docteur en droit public interne (Paris I) et docteur ès Lettres (Paris V). Il se consacre à l'anthropologie appliquée à l'université d'Oran d'abord (1968-88), à celle d'Aix-Marseille (1981-82), d'Harvard (1989) et de Lille I (1988-91), et enfin à l'université de Picardie Jules Verne (1991-2009). Il est actuellement professeur émérite. Rabah Douik « Lecture de l'espace oasien » de Nadir Marouf, éditions Barzakh, 296 pages, prix public : 600 DA.