La Coalition nationale syrienne s'offre un Premier ministre pour administrer les territoires libérés. Son nom : Hassan Hitto, un islamiste qui a eu le soutien du SG de la CNS, Moustafa Sabbagh, un homme d'affaires qui dispose d'un réseau de solides relations dans la région du Golfe, et l'aval des Frères musulmans. Sa démarche pour sortir de la crise actuelle : tout sauf un dialogue avec le régime al Assad. L'opposition est « en plein délire et confusion », écrit Al-Watan, un quotidien proche du pouvoir. Fait saillant qui illustre les divisions qui traversent la coalition : Hitto, le gestionnaire d'entreprises de haute technologie au Texas (Etats-Unis), qui a rejoint l'opposition en novembre 2012, en Turquie, a été élu, hier, à Istanbul, après 14 heures de consultations avec 35 voix. Sur les 73 membres du CNS, 49 seulement ont voté pour ce technocrate qui satisfait, selon eux, les courants islamiste et les libéraux. Les autres, soit 24 membres, ont quitté la salle. Certains ont voulu, par leur abstention, dénoncer un choix dicté par les puissances étrangères. D'autres ont accusé les Frères musulmans d'avoir imposé leur candidat pour détourner la révolution comme ils l'ont fait en Egypte. Ahmed Moaz al-Khatib, le chef de la Coalition, qui s'était dit prêt, fin janvier, à entamer des discussions directes avec ceux qui n'avaient pas au pouvoir du « sang sur les mains », a voté « oui ». « Ma proposition de pourparlers est devenue caduque avec cette élection », dit-il. En attendant, comme ceux qui ont donné leur voix à Hassan Hitto, al-Khatib espère voir ce dernier former « d'ici un mois », un « gouvernement intérimaire », basé dans les espaces libérés. Pour fournir « toute l'aide possible » aux populations, faciliter la livraison d'armes aux rebelles, souhaitée par la France et la Grande-Bretagne, et réussir à obtenir l'allégeance des centaines de groupes armés qui « gèrent » ces « espaces », dit-il. Voilà les armes chimiques ! Cette élection, prélude à la formation d'un gouvernement qui pourrait prendre le siège de la Syrie à la Ligue arabe, intervient quelques heures après le raid mené la veille, pour la première fois depuis le début du conflit par l'aviation de Damas et quelques heures avant la mort de 15 personnes dans le nord du pays par arme chimique. « Les terroristes ont lancé un missile contenant des produits chimiques sur la région de Khan al-Assal dans la province d'Alep, tuant 15 personnes, en majorité des civils », indique Sana. L'Armée syrienne libre dément. « Nous n'avons ni missile de longue portée ni arme chimique », affirme son porte-parole, Louay Muqdad. La communauté internationale a multiplié les mises en garde à Damas contre le recours aux armes chimiques et exprimé sa crainte que ces armes ne tombent entre les mains de certaines factions de l'opposition. Va-t-elle prendre argument sur « cet » incident qui a « franchi toutes les lignes rouges » pour intervenir dans ce conflit qui dure depuis plus de deux ans ? Les Etats-Unis, qui admettent avoir une image « floue » de la réalité de l'opposition syrienne et de ses « multiples facettes », mettent en garde le gouvernement de Bachar al-Assad sur le recours à de tels armements, qui serait « totalement inacceptable ». Le SG de l'ONU, Ban Ki-moon, exhorte les acteurs de ce conflit à trouver d'urgence un règlement politique s'ils veulent sauver le pays de la « destruction complète ».