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Quand le raï des « ch'ouabin » retrouve une nouvelle jeunesse
Publié dans Horizons le 24 - 04 - 2013


Le règne des chebs et chabbats n'est pas encore révolu. Il n'est pas près de l'être. Même si les anciennes voix auxquelles ont succédé d'autres par bureautique interposée ne veulent plus s'afficher avec ce sobriquet qui a fait leur gloire il y a près d'une trentaine d'années. Ce ne sont plus désormais les Chebs Khaled, Mami, pour ne citer que ces doyens qui ont porté cette musique dans les box-offices de la musique mondiale mais plutôt Khaled Hadj Brahim et Mami tout court. Même le King pour le premier et le prince pour le second ne sont presque plus de mise. Les nouvelles voix du raï ont tout aussi beau essayer d'évincer par texte argotique et musique déhanchante et bruyante, le raï des « chouabin » (les vieux dans le jargon de l'ouest du pays) comme les jeunes fans d'aujourd'hui désignent l'ancien raï, ils ne durent que le temps d'une rose. Aussi, Oran, la capitale du raï, même si dans la chanson on déclame qu'il est « sorti », ou né à Bel Abbes, on revient à ces belles ondulations provoquées par ce saxo cher à Bellemou et Botayba ou encore cet accordéon dont les plaintes vous font danser jusqu'à l'aube. Même que Khaled y revient par la grande intonation après avoir franchi la note avec Aïcha ou Didi... « T'rig lycée », « La Camelle » se réécoutent toujours avec délectation, auxquelles viennent se mouvoir « Bakhta » ou « Wahran »... le King a compris qu'il n'a pas meilleur goût que la vielle marmite. Il invite à y tremper sans modération. Et c'est le banquet. Avec aussi des voix qui ont su transcender le temps et se frayer un chemin qui dure au grand bonheur des adeptes, celle de Houari Benchenet qui reprend le flambeau du chiir el malhoun, cette poésie populaire d'El Khaldi, de Ben Brahem. Houari veut faire revivre ces chyoukh et projette d'en compiler les œuvres dans un coffret. Un bel hommage qui, dans la voix de Benchenet, qui demeure fidèle à la mélodie purement oranaise en cet accent singulier du patrimoine. Seul lui sait le chanter. Et en ce printemps, le souvenir plane sur deux grandes voix teintées de terroir, pour y être restées profondément enracinées : Chikha Djenia et Remiti qui se sont éteintes, l'une le 1er avril 2004, l'autre le 6 mai 2006... Mais sans pour cela rallumer et raviver la vieille flamme du Raï T'arb. N'en déplaise à ceux qui n'ont pas fait le voyage pour accompagner ces femmes d'un autre combat, à leurs dernières demeures. A l'image de celles qui, pour survivre, écument les cabarets et les bas-fonds de la côté oranaise en s'usant pour quelques poignées de dinars, contre une vie précaire, un toit éphémère et une santé vulnérable... Le bédoui, les chyoukh, l'q'sasba, les dédicaces enflammées dans des « fikhatar » interminables qui font compter l'argent sans compter sont ce monde à part. Qui, s'il n'existait pas, aurait été créé... aujourd'hui, plus que jamais, il renaît de ses mots qui vont là où ça fait du bien, là où ça fait mal...

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