Avec plus de 4 millions d'habitants Alger respire mal. La ville continue d'absorber une population digne des grandes cités métropolitaines. Elle commence de plus en plus à ressembler à ces mégalopoles tentaculaires qui se sont agrandies anarchiquement pour devenir ensuite de véritables plaies. Il y a risque dans l'air, le flux de voitures convergeant vers la capitale est à peine croyable. Plus d'un million de voitures s'infiltrent chaque matin par les bretelles de la ville. Un véritable rodéo carrossable. Il ne se passe pas une journée sans poussière et son lot de particules nocives. Les gros camions font dans la course pour L'Eldorado, laissant échapper des champignons de CO2. Toute la ville se réveille dans cette jungle de ferraille en cavale. On les reconnaît dans leur tenue d'été, ces routiers qui «avalent» des milliers de kilomètres pour revenir en conquérants dégageant une épaisse fumée en signe de victoire. Le long de la route moutonnière, les matins ne sont pas agréables à vivre, des colonnes de gros porteurs en files indiennes rompent le silence. Le vrombissement de leurs machines fait penser aux célèbres steamers yankees. A croire que la contamination à gagner nos rivages. Dans cette pantomime à quatre roues, on passe pour devenir des champions des relais. Dans la frénésie du business, on fait appel à ces camionneurs pour désengorger le port. On leur attribue cette vertu en signe de compensation pour leur geste attentatoire contre l'environnement. Bon gré mal gré on les aime, ils font partie de notre cadre socio-économique. En chaque algérien somnole un camion, dans le tréfonds de nos souvenirs, il y a toujours un «Big Foot» qui traîne. Dans la tendre enfance, au soir d'une fête de circoncision, le plus beau cadeau à offrir reste toujours un … camion.