C'est une première et une « page » inédite dans l'histoire politique de la région que le Qatar vient de signer à l'aune du « printemps arabe ». Mais surtout par rapport à la partie du monde où aucun monarque n'a abandonné le trône de son propre gré. Cheïkh Hamad ben Khalifa Al Thani, émir du richissime Etat gazier du Golfe, qui joue un rôle diplomatique arabe et international de premier plan, a passé, hier, le flambeau à son fils, cheïkh Tamim, dans l'espoir, a-t-il expliqué dans un discours à la nation, d'« ouvrir un nouveau chapitre » et de « confier les responsabilités à la nouvelle génération ». « Je m'adresse, aujourd'hui à vous, pour annoncer que je remets le pouvoir à cheïkh Tamim ben Hamad Al Thani. (...) Je suis convaincu que pour Tamim, l'intérêt du pays et la prospérité de son peuple seront des priorités », a-t-il tenu à rassurer. Cheïkh Hamad avait déposé son père, cheïkh Khalifa, le 27 juin 1995, lors d'une révolution de palais, héritant d'un petit émirat quasiment inconnu et surtout aux caisses vides. Il a pu, en 18 ans de règne, faire du Qatar l'un des pays les plus riches au monde et un acteur incontournable dans toutes les crises de la région. Ce départ ne devrait pas avoir d'incidence sur la politique générale du pays, proche allié des Etats-Unis. La cérémonie de passation de pouvoir est prévue aujourd'hui. Un important remaniement ministériel qui verrait probablement le départ du Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, cheïkh Hamad ben Jassem ben Jabr Al Thani, qui occupe ce poste depuis 2007. Agé de 33 ans, cheïkh Tamim sera le plus jeune souverain d'une monarchie du Golfe. Nommé prince héritier, il y a dix ans, ce quatrième fils de l'émir a progressivement conforté son autorité au cours des dernières années en prenant la gestion de dossiers sensibles de politique étrangère et intérieure. Il prononcera cet après-midi un discours à la nation. La spéculation bat son plein à Doha sur les personnalités susceptibles de diriger le nouveau gouvernement. Les noms du ministre d'Etat à l'Intérieur, cheïkh Abdallah ben Nasser Al Thani, et du vice-Premier ministre, Ahmed ben Abdallah Al Mahmoud, sont cités. La question de la nomination d'un nouveau prince héritier reste aussi à trancher.