Un nouveau scandale d'Abou-Ghraieb tristement célèbre par les scènes ignobles des détenus irakiens maltraités et humiliés par des soldats américains ? Tout porte à le croire. L'émule d'Abou-Ghraieb, sans changer de nature, a seulement changé de visage. L'alter ego dans l'ignominie de la « fille en laisse » américaine, Lyndie England, est aujourd'hui une soldate israélienne, originaire de la ville d'Ashdod où elle a servi en sous-lieutenant et démobilisée il y a un an. Tout, dans le procédé comme dans le mépris affiché, rappelle la systématisation des atteintes à la dignité humaine et des droits de l'homme les plus élémentaires. Dans son Facebook, elle a mis en ligne, le 16 août, des photos rassemblées dans un album intitulé « Armée-la meilleure période de ma vie » et pris dans une base près de Ghaza. Elle l'a montre toute souriante posant avec des prisonniers palestiniens les mains ligotés et les yeux bandés. Pour elle, il s'agit rien de moins qu'une partie d'exotisme destinée à satisfaire ses fantasmes. Car, en réaction à la polémique suscitée par le nouveau scandale, la soldate avoue ne pas comprendre le mal qu'elle a fait. Sur les ondes d'Army Radio, la radio militaire de l'Etat hébreu, elle affirme que « j'ai juste posté des photos avec eux au second plan. Je l'ai fait sans excitation particulière, juste pour me souvenir de cette expérience. Ce n'était pas une revendication politique ou quoi que ce soit. Il s'agissait juste de me souvenir des mes aventures au sein de l'armée, c'est tout. » L'autre Abou-Ghraieb prouve si besoin est la nature barbare, oppressive et fondamentalement discriminatoire de la colonisation. La Tsahal, marquée aux fers par le rapport Goldstone l'accusant de « crimes de guerre » et ébranlée par le lancement de la commission d'enquête onusienne sur le raid commis contre la flottille de Ghaza, crie au loup pour sauver une image édulcorée et sérieusement entachée de dérives sanglantes. A l'effet de préserver une crédibilité en lambeau, l'armée israélienne s'est fendue d'un communiqué qui dénonce le «comportement honteux» pour avorter dans l'œuf le mouvement de répulsion de la société internationale. Même si son statut d'impunité favorise «l'exception israélienne», adossée au déni de légalité et au rejet de la montagne des résolutions onusiennes jamais appliquées, ce scandale de trop, en violation des dispositions de la convention de Genève (notamment l'article 3 exigeant un traitement humain et indiscriminé des prisonniers et interdisant la torture, les traitements cruels, humiliants et dégradants), a soulevé une tempête d'indignation stigmatisant «le comportement de cette soldate» assimilée à «une culture militaire israélienne qui amène les jeunes soldats à violer systématiquement les droits basiques des Palestiniens ». Pour le directeur exécutif du comité contre la torture, Ishay Menuchin, « il est attendu qu'il (le comportement) est devenu une norme consistant à traiter les Palestiniens comme des objets et non des êtres humains. » A l'heure des négociations indirectes, voulues impératives par Washington, le scandale de la soldate israélienne, en manque de sensations fortes, illustre parfaitement, telle que le relève le centre de presse de l'Autorité palestinienne, « la mentalité de l'occupant fier d'humilier les Palestiniens. »