Des participants au colloque international sur Assia Djebar, organisé par l'université de Tizi-Ouzou, ont soulevé, dimanche dernier, le « paradoxe » consistant en la non traduction en arabe des œuvres romanesques de cette grande dame de la littérature algérienne d'expression française, alors qu'elles ont été traduites dans plus de 30 langues usitées de par le monde. « Aucun roman d'Assia Djebar, dont la notoriété universelle n'est plus à démontrer, n'a été, à ce jour, traduit en langue arabe, hormis une tentative de traduction du livre « Loin de Medine » qui a été rejetée par l'auteur pour son écartement de l'esprit de son œuvre », a relevé la chercheuse Amina Chaouati, également présidente du Cercle des amis d'Assia Djebar, lors de sa communication intitulée « L'œuvre d'Assia Djebar : quel héritage pour les intellectuels algériens ? ». Dans son plaidoyer pour une meilleure diffusion de l'œuvre djebarienne dans sa pluralité, qu'elle a qualifiée de « regard singulier d'une femme sur la société, la culture et l'histoire de l'Algérie », Mme Chaouati a recommandé la réédition, en Algérie, des romans de l'auteur de « Nulle part dans la maison de mon père ou la recherche des points d'ancrage », tout en déplorant également que le film cinématographique « La Nouba des femmes du Chenoua », réalisé par Assia Djebar dans les années 70, « demeure inconnu du public pour sa non projection ». « Malgré l'absence de l'œuvre littéraire d'Assia Djebar dans les librairies algériennes pendant de longues années et l'indisponibilité de ses deux films dans les salles de cinéma, l'influence de son travail et sa trace se trouvent incontestablement présentes », a conclu la présidente du « Cercle des amis d'Assia Djebar ». A l'antipode de cette situation, les participants à cette rencontre issus des universités nationales et de l'étranger, n'ont pas caché leur admiration pour l'expérience nippone dans la traduction des œuvres de cette icône de la littérature algérienne qui s'est forgée un nom dans le gotha littéraire mondial. Cette expérience a été présentée à l'assistance par Mme Kiyoko Ishikawa de l'université de Shizuoka du pays du Soleil Levant, à travers une communication intitulée « Lire et traduire Assia Djebar au Japon », rappelant la traduction en japonais, par ses propres soins, du roman « L'Amour, la fantasia », parue en mars 2011, avant d'être suivie, dans la même et par un autre chercheur japonais, du roman « La femme sans sépulture ». « La parution successive de ces deux traductions contribuera, certainement, à affirmer la présence de l'auteur chez les lecteurs japonais, et à stimuler les études de la littérature maghrébine, surtout algérienne, domaine de recherche à peine entamé dans notre pays, où les œuvres littéraires étrangères sont appréciées par le biais de la traduction en notre langue », a affirmé Mme Ishikawa, qui a estimé que la traduction « joue un rôle essentiel dans la présentation et la réception de la littérature étrangère » dans son pays. De la traduction du roman « L'Amour, la fantasia », l'universitaire nipponne a indiqué qu'elle a mis trois ans pour l'achèvement de la traduction de cette œuvre romanesque, qu'elle a qualifiée de « complexe au niveau de la langue, de la composition, du vocabulaire et de la connaissance historique », l'ayant souvent obligée à consulter des dictionnaires non seulement de français, mais aussi d'arabe et de turc.