Plus de 40 morts dans des affrontements à Tripoli : la Libye est loin de retrouver la paix que les rebelles avaient promise au peuple au lendemain de la chute du régime de Mouammar El Kadhafi. Pis, les violences que se livrent les différentes milices, régnant en maîtres dans plusieurs régions du pays, plongent le pays dans un engrenage meurtrier qui n'est pas près de s'arrêter, notamment à Tripoli où 43 personnes ont péri et pas moins de 450 autres ont été blessées vendredi dernier, lors d'une manifestation « pacifique » contre la présence d'une milice, originaire de Misrata (est), basée à Gharghour, à Tripoli. Le gouvernement, qui peine à asseoir son autorité face à ces groupes armés, bien décidés à défendre leurs « territoires », n'a d'autre recours que d'appeler à la mobilisation de la population, soutenu dans cette démarche par les imams appelant dans leurs prêches du vendredi les Tripolitains à manifester contre les milices, relayant des appels en ce sens du mufti, la plus haute autorité religieuse du pays. Un choix pas très concluant. Toute initiative dans ce sens exacerbe les tensions et débouche sur des violences. Selon plusieurs sources, des membres de cette milice avaient tiré en l'air pour tenter de disperser les protestataires, mais voyant qu'ils n'obtempéraient pas, ils ont tiré sur eux. Dans la soirée, en représailles, des hommes armés, à bord de pick-up, ont pris d'assaut et incendié le quartier général de cette milice, installée dans d'anciennes villas des cadres du régime Kadhafi. Le risque d'une escalade n'est pas exclu, sachant la détermination des uns et des autres à ne rien céder, notamment dans la capitale où l'enjeu politique est majeur. A défaut d'une riposte en bonne et due forme, le gouvernement fait profil bas. Il s'est contenté d'appeler, via un communiqué, à un cessez-le-feu entres les milices en question, en rappelant le caractère « pacifique » de la manifestation. « Nous demandons à toutes les factions armées un cessez-le-feu pour que le gouvernement puisse (...) rétablir le calme dans la capitale », a indiqué le bureau de Premier ministre, Ali Zeïdan, recommandant à la population d'éviter Gharghour. Le président du Conseil local de Tripoli, Sadat Al Badri, est allé plus loin en appelant à une « grève générale », voire à la « désobéissance civile » jusqu'au départ de ces milices. La poudrière libyenne est assurément un mélange détonant d'antagonismes éthiques, politiques, identitaires et culturels : à la loi des milices, se greffe la montée des revendications identitaires. Le « printemps libyen », source de frustrations, vire ainsi au drame de la guerre civile en gestation.