Dix jours seulement après son investiture par le Parlement centrafricain, la présidente Catherine Samba Panza crie à la « déstabilisation ». Elle accuse la Seleka, chassée du pouvoir après la démission forcée de Michel Djotodia, de velléités sécessionnistes défendues par l'un de ses fidèles, Abakar Sabone, créant, à Biro (Nord), le Mouvement pour l'indépendance du nord-est de la Centrafrique (Minca). L'option de la partition a été dénoncée par la Seleka qui s'est retirée du verrou de Sibut, situé à 180 km de Bangui, désormais aux mains de la force africaine, la Misca, installée depuis vendredi dernier dans la mairie de cette ville-clé. Le mouvement rebelle ne veut pas, toutefois, fermer la porte à une solution négociée. Hier, des pourparlers étaient engagés avec la force africaine, entrée sans affrontement dans la ville et installée dans la mairie. « Au moment où je vous parle, la Misca a pris le contrôle de la ville de Sibut. Le contingent gabonais de la Misca s'est installé à Sibut et se répartit dans la ville. Il est évident que les ex-Seleka seront cantonnés, ils vont être désarmés et sécurisés », a annoncé le commandant de la force africaine en Centrafrique, le général Tumenta Chomu. Un geste d'apaisement ? Tout porte à le croire. « Nous voulons la paix, nous sommes centrafricains. Le passé est le passé. Nous sommes prêts à déposer les armes, mais cela dépend des conditions », a déclaré Abdelkader Djelani, un colonel de la Seleka. Lancée en décembre, l'opération Sangaris s'enlise dans des violences communautaires et confessionnelles « sans précédent », selon la Croix-Rouge qui déplore « 30 tués et 60 blessés » jonchant les rues de Bangui. Plusieurs villes ont été désertées par des habitants fuyant les combats. Les combattants de la Seleka (1.500 à 2.000) présents à Bangui, confinés dans des campements de fortune, ont pour certains pris la direction des provinces et des régions sans contrôle. Malgré le formidable dispositif de la Misca (5. 500 soldats africains), encadrés par les 1.600 militaires du contingent français, le bourbier centrafricain de Sangaris reste une source d'inquiétude majeure à la fois par le niveau de violence générée par une intervention décriée et les vertus supposées de la « pacification » en faillite. La sirène d'alarme est tirée par la communauté internationale, appelant à la réconciliation et à la négociation. « La situation sécuritaire est extrêmement inquiétante, avec la poursuite d'attaques contre des civils qui, à leur tour, accroissent les tensions religieuses et intercommunautaires », a martelé, hier, le commissaire à la paix et la sécurité de l'UA, l'Algérien Smaïl Chergui. Le spectre du chaos hante l'Afrique, en conclave à Addis-Abeba, pour tenter de circonscrire le brasier. « L'effondrement de la loi et de l'ordre est une menace pour l'existence même de la Centrafrique », estime Smaïl Chergui relevant les « graves conséquences sur la sécurité et la stabilité régionales ». Des fonds sont levés en faveur de la Misca confortée dans son rôle et la « pleine capacité de mener avec succès ses opérations et de remplir son mandat, en particulier à la lumière de l'actuelle escalade de la violence », juge le président sud-africain Jacob Zuma, qui a promis le versement de un million de dollars. Le Premier ministre éthiopien, Hailemariam Desalegn, s'est également engagé à verser 500.000 dollars pour empêcher la Centrafrique de « sombrer dans un effondrement total ». Une contribution des autres pays de 500 millions de dollars est attendue. Elle est destinée, entre autres, à consacrer, du moins, jeter les bases d'une gestion africaine des conflits du continent.