La guerre ethnique reprend de plus belle au sud Soudan. Au bout de cinq mois de combats qui ont verrouillé la sortie de crise négociée, le leader des rebelles, Riek Machar, veut contrôler les champs pétroliers et marcher sur la capitale Juba pour destituer le président Salva Kiir. « Si on doit faire tomber le dictateur, Juba est une cible, les champs pétroliers sont des cibles », dit-il. Dans cet important Etat pétrolier, moins de 3 ans après l'accès à l'indépendance, le conflit sanglant entre le président sud soudanais, candidat à sa propre succession aux présidentielles, et son ancien vice- président, limogé le 23 juillet 2013, s'enlise dans une lutte de leadership tragique : des milliers de morts, 900.000 déplacés dont une grande majorité retranchée dans les bases de l'ONU, 255.000 réfugiés dans les pays voisins (Ethiopie, Kenya, Ouganda, Soudan), risque de famine et de malnutrition...Ni les menaces de l'ONU ni les sanctions lancées, à la mi-mars, par Bruxelles et Washington n'ont réussi à remettre à flot le processus de négociations suspendu jusqu'au 30 avril. Alors que les combats continuent de faire rage, les belligérants persistent dans leurs divergences qui, malgré la percée en matière d'agenda, ont jusque-là compromis la conclusion d'un accord final. Le président sud-soudanais reste hermétiquement opposé à la démarche de son rival qui a exigé la libération des 11 prisonniers politiques (dont 8 de ses ministres) et leur participation aux rounds de négociations. Résultat des courses : l'arrêt des discussions parrainées par l'Igad (Autorité intergouvernementale pour le développement), qui regroupe plusieurs pays d'Afrique de l'Est. Dans cette impasse, lourde de conséquences sur l'avenir du jeune Etat et la stabilité régionale, le retour au langage des armes traduit la volonté de Riek Machar d'exercer des pressions pour contraindre le camp adverse à plus de concessions. L'offensive de Machar a déjà commencé. Elle se concentre sur la ville pétrolière et stratégique de Bentiu, considérée comme « la première étape de la libération des champs pétroliers », dont la chute a été toutefois démentie par le porte-parole de l'armée, Philip Aguer. Un ultimatum a été adressé par les rebelles aux compagnies pétrolières sommées d'arrêter la production et d'évacuer leur personnel. « Si elles ne s'exécutent pas, les compagnies pétrolières risquent de voir stopper la production par la force et la sécurité de leurs équipes serait menacée », a averti le porte-parole des rebelles, Lul Ruai Koang. La bataille du pétrole est donc lancée.