Le gaspillage a encore fait parler de lui lors de ces premiers jours de Ramadhan. Selon le porte-parole de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA), Tahar Boulenouar, 10% de la production nationale en fruits et légumes ont été gaspillés depuis le début du mois sacré. Un taux qui serait beaucoup plus important, selon l'Association de protection et d'orientation du consommateur et de son environnement (Apoce). Le gaspillage se décline en plusieurs aspects. D'abord au niveau des chambres froides et des aires de stockage. « Une importante quantité de produits alimentaires est gaspillée à ce niveau », précise-t-il. Et pour cause, la manière dont sont gérées ces chambres froides ne respecte la moindre norme en matière de stockage, particulièrement la maîtrise de la température de réfrigération. En outre, le produit algérien ne peut être stocké au-delà d'un mois, alors qu'ailleurs, le même produit est conservé pendant 4 mois sans être abîmés. La deuxième forme de gaspillage est au niveau des marchés de gros. « Des quantités importantes de marchandises sont jetées faute de clientèle », signale-t-il. Il cite en exemple l'oignon qui ne trouve plus d'acheteurs. Ce produit a connu cette année une surproduction. Pour le porte-parole de l'UGCAA, le gaspillage dans les marchés de gros s'explique par l'absence de marchés de proximité à même d'absorber la marchandise. « Il faut savoir que grossistes se trouvent chaque jour dans l'obligation d'écouler leurs marchandises pour libérer la place à une nouvelle marchandise, plus fraîches pour le lendemain », explique-t-il. Le aspillage est également observé au niveau des hôpitaux et autres institution publiques. Ici, des « quantités non négligeables de produits alimentaires » sont jetées chaque jour dans les poubelles. Il s'agit, particulièrement, du pain et des tomates en conserve. Et puis, il y a le gâchis au niveau des ménages. « Les familles n'ont pas abandonné leurs mauvaises habitudes d'acheter de grandes quantités de nourriture sans pour autant arriver à les consommer », regrette Boulenouar. Pour l'UGCAA, il est urgent de mener une étude approfondie pour mettre fin à cet état de fait qui provoque des pertes économiques conséquentes couplées à une perturbation dans le marché qui fait que les prix augmentent toujours sans raison économique apparente et justifiée. Tahar Boulenouar note que le gaspillage touche plus les produits subventionnés par l'Etat, excepté le lait. Pour sa part, le président de l'Association de protection et d'orientation du consommateur et de son environnement, Mustapha Zebdi, a annoncé que le gaspillage alimentaire, notamment, les fruits et légumes, dépasse de loin le seuil de 10%. Il a indiqué que le pain, de par son accessibilité pour les consommateurs, est le plus touché par cette pratique qui diffère d'un quartier à un autre. Quartier chics, dites-vous ? Reste que, elon lui, le phénomène s'installe d'une manière remarquable et remarqué au niveau des ménages des quartiers résidentiels, des restaurants collectifs, notamment les hôpitaux, et les marchés de gros. Face à ce constat alarmant, faut-il rester sans rien faire ? « La marge de manœuvre est limitée pour la simple raison que le problème est avant tout une question d'éducation qui touche directement à la morale des consommateurs », estime le président de l'Apoce. Toutefois, il a indiqué qu'il est question d'organiser des campagnes de sensibilisation auprès des ménages qui cibleraient particulièrement les enfants. Qu'en pense le ministère de l'Agriculture ? Un petit rappel : l'année dernière, en pareille période, le département de Nouri avant lancé une campagne de sensibilisation dans ce sens. Cette année, il ne l'a pas encore fait. Mais selon un cadre du ministère, la responsabilité est partagée. « Il est vrai que le citoyen a une part de responsabilité mais il n'est pas le seul fautif », relève le responsable. A titre d'exemple, il cite le pain, aliment le plus exposé au gaspillage, dont les normes de fabrication ne sont pas respectées. Résultat : une mauvaise qualité du produit qui ne trouve de place que dans les poubelles. Pour ce cadre, on n'arrive toujours pas à se débarrasser des mauvaises habitudes de consommation héritées de l'époque du socialisme marquée par la pénurie des produits alimentaires. « Durant le Ramadhan on a l'impression que les Algériens mangent avec les yeux », note-t-il. Il regrette que par ce comportement, les consommateurs portent atteinte à la sécurité alimentaire du pays. Une situation qu'ils pourraient, selon lui, aisément éviter avec une culture de consommation responsable. Un chiffre : selon l'UGCAA, la quantité de fruits et légumes commercialisée depuis le début du Ramadhan avoisine les 3 millions de quintaux au niveau des 43 marchés de gros à l'échelle nationale.