La cinémathèque de Bejaïa a vécu, samedi passé, un moment bien particulier avec la projection concoctée par le ciné-club « Allons voir un film », de l'association Project'heurts, de cinq courts métrages réalisés dans le cadre d'un projet intitulé « Djazair mon amour » par des cinéastes canadiens, du Québec plus précisément, qui ont voulu rendre, par l'image, un aspect frappant d'un pays qu'ils découvrent, à l'exception de l'un d'entre eux, pour la première fois. Sans a priori, sans préparatifs préalables, Samuel Matteau, Elias Djemil, Yannik Nolin, Michaël Pinault et Guillaume Fournier avaient tout juste 48 heures pour confectionner chacun leurs films. Cela a donné « 1-2-3 Viva l'Algérie », sur la passion des Algériens pour le foot, « Une idée pour demain » sur la perte de l'espoir par une certaine jeunesse et un autre, « La douceur de ses mains » sur les sentiments provoqués par le retour au pays natal, « Au fil du temps », qui plonge dans le monde de la musique algérienne underground, « Karim+Hadjer », un film d'amour qui a la particularité de ne comporter aucun dialogue, du moins parlé, et qui a été inspiré par les graffiti sentimentaux qui ornent murs, rochers, arbres et même cactus ! Les réalisateurs, lors des débats, ont, chacun, expliqué les motivations qui les ont amenés à adhérer à ce projet. Si le désir de retrouver le pays d'origine, plus de vingt ans après, a renforcé cette envie pour Elias Djemil, le challenge a été pour tous d'aller voir de visu un des pays qui composent ce monde « bizarre » pour l'Occidental que l'on appelle « arabe » ou « musulman » et tordre le cou, au moins le temps d'un court métrage, à bien des a-priori que la société, canadienne en l'occurrence, cultive à travers ses médias, sa culture et son regard sur l'immigration. Regard canadien sur l'Algérie, les films étaient bien évidemment destinés d'abord au public canadien, pour éclaircir, en quelque sorte, l'image qu'ils s'en sont fait de ce pays, mais les réalisateurs ont tenu aussi à avoir le feed back du public algérien. Et le public bougiote n'a pas été avare de critiques, une franchise d'ailleurs bien appréciée comme a tenu à l'exprimer l'un des invités ! Deux aspects ont essentiellement irrité ces spectateurs, celui de ressasser des clichés éculés et de ne leur avoir rien appris qu'ils ne savent déjà. Ce à quoi les réalisateurs répondent qu'il s'agissait pour eux de saisir sur le vif les contours de la société algérienne et qu'ils n'avaient nulle intention de reprendre des clichés, mais de montrer des aspects tels qu'ils sont perçus par un regard étranger, sans traitement ou réflexion préalable. Les réalisateurs reconnaissent volontiers que la réalité algérienne est bien plus complexe que ce qu'ils ont réussi à saisir. Au demeurant, expliquent-ils, le projet « Djazaïr mon amour » se veut être un début de dialogue culturel entre les sociétés canadiennes et algériennes, qui verra peut être d'autres réalisateurs canadiens reprendre le fil de l'idée et, pourquoi pas, des cinéastes algériens qui iront proposer aux Canadiens le regard qu'ils posent sur eux et sur leur société. PS : les docus sont agréables à voir, quant au reste, libre à chacun de se faire une opinion.