Une conférence, tenue, hier, à l'occasion du Salon international du livre d'Alger (Sila 2014), à la salle Ali-Maâchi, a remis sur le tapis la nécessité de « décoloniser l'Histoire », pour reprendre la formule chère à Mohamed Chérif Sahli, qui en a fait un titre-manifeste d'un de ses ouvrages. Les conférenciers Rédha Malek, Zahir Ihaddaden et Amar Belkhodja ont mis en exergue la nécessité de réécrire l'Histoire en s'imprégnant des théories de Mohamed Chérif Sahli. La rencontre, modérée par le journaliste Fayçal Metaoui, a été organisée par les éditions Quipos, gérées par Assia Baz. Deux thèmes, « Décoloniser l'Histoire » et « Le message de Yougourtha », un autre livre de Mohamed Chérif Sahli, ont servi de fil conducteur aux interventions suivies de débats. Intellectuel nationaliste Mohamed Chérif Sahli est, selon Rédha Malek, « un intellectuel authentique de la pointure de Malek Bennabi et de Mostapha Lacheraf ». « C'est un nationaliste algérien, dans la mesure où jeune étudiant, il avait pris conscience de son inexistence en tant que colonisé », a-t-il affirmé. Mohamed Chérif Sahli, qui a fait ses débuts dans le journal El Oumma, appartenant à l'Etoile nord-africaine, a milité ensuite dans les rangs du PPA-MTLD. « Il s'est mis donc à la recherche de sa personnalité et des racines de sa nation », a expliqué le conférencier. Après l'Ecole normale de Bouzaréah, il s'était rendu à Paris pour poursuivre ses études en lettres, et là, débutent ses recherches et ses écrits », a fait savoir Rédha Malek. Evoquant ses écrits, il a estimé qu'« ils reflètent son parcours et sont caractérisés par la rigueur intellectuelle, la valeur morale et la modestie ». Mohamed Chérif Sahli « est un latiniste qui a étudié l'Histoire pour mieux comprendre et situer sa personnalité. Lorsqu'il a écrit « Le message de Yougourtha'', il l'évoque comme étant son ancêtre et celui de l'Algérie », a-t-il ajouté. Le livre, publié à la fin des années 40, avait permis à Sahli de remonter très loin et de renouer avec l'Antiquité marquée par les guerres menées par Jugurtha et Takfarinas. C'est de cette manière qu'il a découvert l'existence de la Numidie. Cette dernière « a été oubliée, occultée. Même Ibn Khaldoun n'avait pas évoqué Massinissa (Aguelidh Amokrane) et Jugurtha. Pourtant, c'était Massinissa qui a fixé les nomades, les a poussés à développer l'agriculture », a fait remarquer l'orateur. Il conviera, pour conclure, « à décoloniser l'Histoire et à rectifier les erreurs afin de faire abstraction de la malveillance des historiens qui ont accompagné l'œuvre des colonisateurs ». Pour l'universitaire Zahir Ihaddaden, « les théories de Sahli, apparues il y a cinquante ans, sont restées lettre morte ». « Certes, un regain d'intérêt a été constaté lors d'un récent colloque, qui s'était tenu dans sa région natale d'Ath Ouaghlis (Bejaïa) », s'est-il félicité. « Il faut secouer les choses, car les écrits d'un André Julien et d'autres historiens illégitimes sont toujours en vogue. Les étudiants les consultent à ce jour et continuent d'y puiser leurs connaissances », a-t-il regretté. Le public a exprimé sa satisfaction pour le choix d'une telle thématique et la volonté de sortir l'auteur de l'oubli.