Déjà fragilisé, depuis 2010, par la perte de contrôle d'une chambre sur deux, le camp démocrate a fait son deuil du Congrès passant aux mains des républicains. Au Sénat, dominé depuis 2006 par les démocrates, la nouvelle majorité (51 des 100 sièges), s'est dessinée avec la conquête des 6 sièges nécessaires (sur les 36 à renouveler) arrachés notamment dans le Colorado, l'Arkansas et le Dakota du Sud. Dans le Kentucky, le sénateur Mitch McConnell a conservé son siège pour diriger, en tant que chef de la majorité, l'opposition. La mainmise républicaine sur le Congrès se renforce par la récupération de 14 à 18 sièges à la Chambre des représentants qui leur donneraient au moins 247 des 435 sièges. Il s'agit de la plus forte majorité républicaine depuis 1930. La victoire républicaine annonce une fin de mandat problématique. La nécessaire cohabitation entre un Président, disposant seulement de son droit de veto et de légiférer par décret, et la nouvelle majorité ne sera pas de tout repos. Elle pèsera sur la vie institutionnelle vouée, 4 ans durant, à une guerre de tranchées et à une totale paralysie. « Il sera pratiquement impossible de bâtir quoi que ce soit entre la Maison-Blanche et le Congrès sur les deux années à venir », a prédit l'historien Douglas Brinkley, de Rice University (Houstan, Texas). De fait, le magazine en ligne américain Slate juge « un record absolu » pour un Président, depuis 1945, le fait que la présidence d'Obama « n'a pas été en mesure de faire voter un texte, hors lois de finances, depuis 1.500 jours ». Aucune réforme n'a été votée. Le New York Times écrivait, en janvier, qu'« à quelques exceptions près, le Président ne pourra pas faire grand-chose sans signer des lois. Il ne pourra pas augmenter le salaire minimum de la majorité des travailleurs, ni régulariser des millions d'immigrés sans papiers, encore moins procéder aux aménagements nécessaires à la législation du système de santé. De plus son successeur pourra défaire ses actions d'un trait de plume, comme Obama l'a fait pour certaines politiques de l'ère Bush au lendemain de son investiture en 2009 ». Obama, qui a promis, en janvier, une « année d'action », a longtemps souffert du blocage républicain. Le changement de gouvernail est perçu comme une volonté de changement exprimée par le vote sanction. A la sortie des urnes, les sondages reflètent le marasme de l'électorat désapprouvant, à 79%, le travail du Congrès et se déclarant insatisfait de l'Administration Obama. « Cette expérience de trop d'Etat a suffisamment duré », a martelé le nouveau chef de la majorité au Sénat, appelant à un changement de cap et à « remettre le pays sur la bonne voie ». Pour le président de la Chambre, le républicain John Boehr, le congrès qui prendra ses fonctions, début janvier, va s'atteler à « réformer le code fiscal, réduire le problème de dépenses, réformer le système juridique, le système de réglementation et améliorer le système éducatif ». L'effet obamania, qui a fait rêver l'Amérique, incarnée par le retour aux idéaux de Martin Luther King, s'est estompé dans la douleur. En hommage aux 50 ans du fameux discours, « I have a dream », Obama a reconnu, en août 2013, qu'« il nous reste beaucoup à faire » dans le dur combat contre la discrimination raciale ressurgie, au devant de la scène, à la faveur des émeutes de Fergusson (Missouri) et de la polém ique médiatique et judiciaire survenue après la mort du jeune Afro-Américain Trayvon Martin, en Floride, abattu par balles, en février 2012, par le coordinateur latino-américain de la surveillance de voisinage, George Zimmerman. Mais, les fausses promesses d'un « vrai départ », annoncé le 4 juin 2009, depuis l'université du Caire, ont révélé le vrai visage du Président désormais sur les traces de son prédécesseur honni et impuissant à tenir ses engagements face au diktat de son allié israélien. Il lui suffisait juste de participer à redorer l'image ternie de l'Amérique et de surfer la vague houleuse de la crise pour « redonner confiance dans la tempête ». Mission réussie avec une croissance au rendez-vous et un chômage en baisse (5,9% de la population active contre 10% en 2009). Le commandant est seul à bord du navire déserté par des candidats démocrates prenant leurs distances, en pleine campagne, avec le Président contraint d'envoyer, en première ligne, sa femme Michèle ou le couple Clinton attentif à l'après-Obama.