Premier à intervenir parmi les conférenciers, Hadri Samir, avocat, a mis l'accent sur les insuffisances du code de la famille, indiquant que les différentes dispositions relèvent, certes, d'une intention louable de protection contre les abus, mais elles pêchent au niveau de leur application, notamment en ce qui concerne l'authentification du mariage coutumier, indiquant qu'au niveau d'Oran, près de 500 affaires restent pendantes chaque année et appelle, en conséquence, à une révision qui associe impérativement toutes les parties intéressées. La représentante de l'association Rachda, Dalila Aroudj, s'est attelée à définir les deux types de mariage en cours en Algérie, indiquant que la Fatiha lue durant les fiançailles n'a qu'une valeur morale, une bénédiction à l'intention de contracter mariage, estimant que les imams ne doivent religieusement valider le mariage que si les deux futurs époux se sont inscrits à l'état civil. L'oratrice a indiqué que la reconnaissance du mariage coutumier est un problème qui se pose avec acuité pour les épouses de polygames, notamment lorsque les enfants doivent être scolarisés. Elle a souligné, également, le flou dans l'application qui entoure certaines dispositions, comme l'établissement de l'autorisation de la première épouse ou l'attestation de la capacité financière du candidat à la polygamie de subvenir aux besoins de plusieurs foyers. La Dr Zoubida Igroufa, de l'université de Bejaïa, rappelle que le mariage en Algérie est placé sous le sceau de la religion, mais que la lecture de la Fatiha n'est suivie d'aucun effet juridique. Elle estime que le recours au mariage coutumier est le fait de personnes qui ignorent les conséquences qui peuvent en découler ou tentent de contourner des dispositions contraignantes (bilan de santé, autorisation de la première épouse..) à la contraction du mariage, ou pour préserver des avantages matériels (pensions de veuves, de filles de chahid...). Dans tous les cas, soutient-elle, ce sont les enfants qui trinquent si le conjoint nie la relation conjugale. Dans ce cas, se pose, en effet, le problème de la filiation, sans compter les questions d'héritage. Pour dépasser cette situation dommageable, elle propose de s'inspirer de l'expérience égyptienne, afin que les gens puissent se marier selon la coutume mais sans que cela se répercute négativement sur la famille. Le Dr Farid Triki, de l'université de Bejaïa, met en exergue l'absence d'une culture de contractualisation des actes sociaux dans la société algérienne, s'appesantissant sur le fait que le recours au mariage coutumier est devenue la panacée pour éviter les écueils administratifs, par exemple dans les cas de l'autorisation parentale pour qu'une fille se marie, dans une relation extraconjugale, ou avec une mineure, qui doit être « légalisée », des vieilles filles qui acceptent cette voie pour accéder au statut de femme mariée, pour préserver des avantages matériels dans le cas des femmes divorcées ou veuves, etc. Il relève, également, le fait que l'imam qui officie à la cérémonie n'a aucune prérogative légale d'exiger un acte de mariage préalablement à la lecture de la Fatiha. De son côté, l'avocate Faïza Seghir s'est penchée sur les procédures d'authentification du mariage, indiquant que si une seule des conditions n'est pas remplie, le processus n'aboutit pas et la demande de régularisation est rejetée. Pour illustrer tout cela, un témoignage a été exposé par Yazid Djerrah, président de l'association Ikhoulaf d'Akbou qui a eu à suivre le cas d'un enfant né d'un mariage coutumier qui a fini par un divorce. Mais, si la relation conjugale a été administrativement établie, la filiation de l'enfant reste, par contre, pendante, pour une question d'héritage. Une situation qui, explique l'intervenant, s'est compliquée avec le décès de son géniteur présumé.