Sur les 27 candidats en lice, 22 dans les faits, 2 se démarquent : Moncef Marzouki, l'actuel Président (69 ans) qui se présente en tant qu'indépendant sous le slogan « On gagne ou on gagne », et Béji Caïd Essebsi, 88 ans, le candidat de la coalition Nidaa Tounes. Même si les observateurs doutent de la possibilité qu'il épasse le cap des 50% dès le premier tour, Caïd Essebsi est certain de l'emporter. Outre son parti, l'ancien ministre de l'Intérieur de Bourguiba a l'appui d'une nuée de partis et de la majorité des 5 candidats qui se sont retirés et des 41 autres qui n'ont pas été retenus par l'Instance supérieure indépendante pour les élections. Il veut, dit-il, la défense des droits de la femme, la promotion d'un islam modéré, la restauration d'un Etat moderne et fort. Ses détracteurs, particulièrement ceux de la Troïka (le CPR de Marzouki, Ettakatol de Ben Jaafar et Ennahda de Ghannouchi), lui reprochent sa campagne électorale sur « la stratégie de la peur », ses liens avec les réseaux de l'ancien régime et surtout d'avoir servi aussi bien sous Bourguiba que sous Ben Ali. Certains y voient avec l'avènement d'Essebsi au Palais de Carthage, le retour des ex-partisans de Ben Ali au pouvoir avec pour quelques-uns, un « esprit de revanche contre la révolution ». Un risque que la Constitution, qui accorde au futur chef de l'Etat des pouvoirs restreints, l'essentiel de l'exécutif relevant du Premier ministre issu de la majorité parlementaire, a prévu. Selon les derniers sondages, Essebsi obtiendrait 30% des intentions de vote contre 25% pour Marzouki qui n'a pas cessé pendant sa campagne électorale de se présenter comme le candidat de la révolution, et surtout le garant d'un non-retour aux politiques répressives de l'ancien régime. Parmi ses soutiens : le Congrès pour la République, son parti, le courant démocratique, El-Bina El Watani, El-Bina El Magharibi, Tounes Beïtna, le Mouvement national pour la justice et le développement, Tounes Ezzeytouna et le Mouvement Wafa. Ennahda, qui sait que l'enjeu principal de ce scrutin est la formation de la coalition qui dirigera le pays pendant les 5 prochaines années, n'a pas présenté de candidat. Le mouvement de Ghannouchi a laissé le choix à ses membres pour élire un président qui garantisse la démocratie et flingue indirectement Essebsi en raison de ses « fréquentations » et de son souhait d'un Etat fort. Autrement dit, le choix de ses électeurs pourrait aller vers l'actuel Président, qui a fait appel aux ligues de protection de la révolution, aux prédicateurs et à tous les « ennemis » de l'ex-régime. C'est la première fois que les Tunisiens qui n'ont connu que deux Présidents depuis leur indépendance en 1956, Habib Bourguiba, le « Père de l'indépendance », et Ben Ali, pourront choisir librement leur chef d'Etat. Si aucun des candidats ne remporte la majorité absolue aujourd'hui, un second tour est prévu fin décembre.