Des historiens estiment que tout Algérien a le droit de s'exprimer sur l'Histoire, mais il ne peut en aucun cas porter des jugements ou de l'utiliser à des fins politiques. « On ne doit jamais politiser notre Histoire. L'Histoire ne se politise pas », a estimé le professeur d'Histoire à la Faculté d'Alger, Mohamed Lahcène Zeghidi. Interrogé sur les propos tenus par l'ancien président du RCD, Saïd Sadi, à l'encontre de Messali El Hadj, Ahmed Bebella et Ali Kafi lors d'une conférence-débat à Bejaïa, l'historien a préféré ne pas s'exprimer sur cette affaire. « Tout individu a le droit de s'exprimer sur l'Histoire mais on ne doit jamais utiliser notre Histoire à des fins politiques », a-t-il soutenu. Pour cet historien, personne n'a le droit de porter des jugements historiques. « Seuls les historiens et les chercheurs en Histoire peuvent faire des constats mais pas émettre des jugements, et ce, sur la base de recherches pour arriver à des vérités historiques. C'est la mission des historiens et de personne d'autre, même s'il se réfère à des documents car le document n'est jamais une vérité », a précisé le professeur, ajoutant qu'on doit préserver l'esprit de la Révolution et le sentiment de fierté de notre Histoire. Lutter contre la culture de la trahison Pour sa part, l'ex-membre du Conseil constitutionnel, juriste et historien, Ameur Rekhila, a plaidé pour un débat purement historique sur le rôle des chercheurs, notamment dans l'écriture de l'histoire de la Révolution. L'historien a signalé que les jugements portés par l'ancien président du RCD ne sont pas les premiers du genre. « Messali El Hadj a fait l'objet de plusieurs polémiques sur son rôle, notamment durant la guerre de Libération. De même pour l'ancien président Ahmed Ben Bella. L'histoire de l'Algérie, riche et unique, a été toujours exploitée politiquement et a fait l'objet de polémiques. Ce qu'il faut savoir, c'est que les débats sur la Révolution étaient plus politiques qu'historiques, en l'absence d'objectivité, qui est l'une des conditions de la recherche et de l'écriture historiques », a-t-il souligné. Le juriste parlera de l'article 62 de la Constitution qui stipule que l'Etat garantit la protection et la préservation des symboles de la révolution nationale. Toutefois, il a estimé que la justice n'aurait pas dû s'impliquer dans une affaire liée à l'histoire. « Laissez les historiens s'exprimer sur Messali » De son côté, l'historien Mohamed Abbès a soutenu que l'ancien président du RCD est un homme politique qui devrait mesurer ses propos et ne pas lancer des jugements aussi graves, notamment quand il s'agit de symboles de la révolution algérienne. « Il faut permettre aux historiens de s'exprimer sur Messali El Hadj avant et après 1954. Avant le déclenchement de la guerre de Libération, Messali était le père du mouvement national. Il faut reconnaître, en tant qu'historien, qu'il a commis des erreurs après 1954. Mais Messali était en résidence surveillée, il faut prendre en considération cette situation et reconnaître ses sacrifices. C'est lui qui a lancé l'idée de l'indépendance. Personne ne peut jeter le discrédit sur son combat », a-t-il souligné. De même pour l'ancien président Ahmed Ben Bella, qui a réussi, selon lui, à convaincre les Egyptiens à soutenir notre révolution. « Est-ce une trahison que d'avoir réussi à persuader les autorités égyptiennes et d'avoir était brillant dans les négociations ? », s'interroge Mohamed Abbès qui trouve également infondées les accusations à l'encontre d'Ali Kafi. Tout comme le docteur Rekhila, l'historien estime que la justice ne doit pas s'impliquer dans cette affaire. Le président de la Fondation du 8 Mai 1945, l'historien Mohamed El Corso, a refusé de s'exprimer sur le sujet.