«Cela fait presque 10 ans que nous habitons dans un F1 que nous partageons à six. Au fur et à mesure que les années passent, les problèmes de notre quotidien deviennent de plus en plus étouffants et insupportables. Entre les maladies, la promiscuité et la peur du lendemain, nos rêves piétinent. Sincèrement, j'ai pratiquement perdu tout espoir d'être délivré un jour de ce malaise», regrette un des locataires. La colère et le dépit de ce dernier, se lisent aussi sur les visages des autres habitants de la cité. «Ce n'est pas normal, j'ai 17 ans et je suis obligé de partager avec mes parents, mes sœurs ainsi que mon frère la chambre qui fait office de notre appartement pour dormir la nuit», lance Mohamed un jeune lycéen. En effet, une fois à l'intérieur de l'un des 90 studios, ce qui frappe l'esprit du visiteur est la promiscuité des lieux. Dès que la porte s'ouvre on entre directement dans une petite pièce qui fait office, le jour, d'une salle de séjour et la nuit se transforme en une chambre à coucher pour tous les membres de la famille. «La salle de séjour n'a de vrai que le nom, car cela fait un lustre que je n'ai pas eu le bonheur de recevoir des invités. Même mes parents ne viennent pas chez moi, pour la simple raison que je n'ai même pas d'espace à leur offrir», se désole un des résidants. Avant que son voisin lui emboîte le pas : «dès qu'on déploie les matelas la nuit on ne peut plus ouvrir la porte, car le moindre centimètre carré du studio est couvert de linge». Avec le temps, les locataires des 90 appartements F1 de Hadjout ont su s'adapter et se résigner aux lois dures imposées par la promiscuité. Pratiquement, ils ont tous procédé à des réaménagements et des modifications intérieurs. La cuisine a été tout bonnement supprimée et l'espace transformé en une «chambre à coucher». Le petit espace douche, une fois débarrassé de sa robinetterie, a cédé ses 5 M2 pour les ustensiles de cuisine. Et ce n'est pas tout ! Tous les meubles et l'électroménager sont de petit format. «Malheureusement en plus de la promiscuité on doit faire face à d'autres problèmes. En effet, outre le fait que nos appartements ne sont pas branchés au réseau du gaz de ville, ce qui nous oblige à s'approvisionner en bonbonne de gaz, un bon nombre d'habitants souffrent de maladies chroniques à cause de l'humidité. Il n'est pas rare également de trouver parmi nous des personnes qui sont sujets à des troubles psychiques à cause de notre situation», fera savoir Ahmed un locataire. Et pourtant, depuis leur recasement provisoire dans cette cité, ils ont frappé sur toutes les portes pour raconter leur chagrin collectif. «On a sollicité toutes les autorités pour reconsidérer notre cas. Mais aucun écho favorable ne nous est parvenu à ce jour. On a même sollicité récemment le président de la République, car nos espoirs sont entièrement fondés sur son sens d'équité et de justice, d'autant plus qu'il a pris la décision d'éradiquer ce genre d'habitation inhospitalière», confie l'un d'eux. En attendant de jours meilleurs, les habitants de la cité 90 logements F1de Hadjout sont résignés à prendre leur mal en patience, tout en pensant qu'un jour proche la vie dans un petit studio ne sera qu'un lointain souvenir.